Live Report : Asaf Avidan & Guest – Nancy Jazz Pulsations 2013

Une fois n’est pas coutume, cette année encore, les Nancy Jazz Pulsations font vibrer la ville Meurthe-et-Mosellane en ce début d’automne. Naviguant sur le thème de la Nouvelle-Orléans, le festival propose, cette année encore, un melting-pot de ce qui se fait de mieux en matière de musique qu’il s’agisse de jazz, de rock, de pop ou encore d’electro. Une mission illustrée, et accomplie, en une seule soirée qui a vu se produire, sur la scène du Chapiteau de la Pépinière, l’étonnant Asaf Avidan. Mais avant d’en arriver là…

 

C’est tout d’abord les frenchys de Johnny Cash All Stars qui s’emparent de la scène à 20h00 pétante – s’il y a une chose pour laquelle les NJP sont réputés, c’est bien leur ponctualité – avec la lourde tâche de chauffer les planches et le public. Lourde ? Peut-être pas tant que ça.

Dès les premières notes, la foule, déjà nombreuse pour cette soirée annoncée sold-out, s’immisce dans l’univers du quartet et se met à bouger aux rythmes des plus grands titres de « l’homme en noir ». Il faut bien reconnaître que la formation n’est pas dénuée de talent. Le concept est, quant à lui, rempli de bonnes idées et d’originalité. Car si le nom de la formation m’aura laissé croire à un énième « tribute band » (littéralement « groupe hommage » se contentant de faire des reprises calquées à la note près sur l’originale), je comprends rapidement qu’il n’en est rien.

Certes, les morceaux de Cash sont exécutés avec rigueur pour produire une copie quasi conforme aux originaux, cependant le but du groupe, clairement revendiqué, est de nous faire revivre l’histoire du rock’n’roll à travers la carrière du Man in Black et de ses pairs. On trouve donc saupoudré par-ci, par-là, tout au long du set, des morceaux d’Elvis, des Beatles, d’Eurythmics et, plus étonnant encore, de Nirvana et Soundgarden, le tout réarrangé à la sauce Johnny Cash. Si la transition de ces morceaux à  ceux de Cash s’avère parfois difficile au niveau vocal, l’effort n’en reste pas moins louable et plutôt bien exécuté. Petit bémol tout de même pour Hurt, la reprise de Cash du morceau de Nine Inch Nails, un monument qui, selon moi, est intouchable et devrait rester intouché.

Changement complet de registre à 21h00 avec l’arrivée sur scène de Trombone Shorty & Orleans Avenue. Si les NJPs m’ont habitué aux claques, je dois admettre que celle-ci est la plus grosse que j’ai jamais reçue lors de ce festival. Accompagné d’une base rock classique (guitare, basse, batterie) et d’un duo de saxophone, le jeune Troy Andrews, alias Trombone Shorty (surnom acquis alors qu’il jouait du trombone dans une fanfare de la Nouvelle-Orléans à l’âge de 6 ans) nous fait une démonstration de trombone et de trompette à couper le souffle.

Maniant ses instruments comme s’ils n’étaient qu’une extension de son propre corps, Troy nous fait voyager dans son univers, un monde teinté de rock, de jazz, de funk, mais aussi de R’n’B et de rap ! On retrouve donc, au milieu de son répertoire de reprises, trônant aux côtés des James Brown, Marvin Gaye et autres Lenny Kravitz (avec qui il a d’ailleurs partagé la scène de nombreuses fois), un morceau d’Usher et un autre de Snoop Dogg. Partageant volontiers la gloire avec ses talentueux musiciens, Troy nous offre l’étendu de ses prouesses aux cuivres, ainsi qu’à la voix, sur un plateau d’argent.

Impossible de rester de marbre et de ne pas en redemander à la fin de son heure et demi de set. Un prodige à écouter sans modération.

Arrive finalement le moment tant attendu, la montée sur scène d’Asaf Avidan. Propulsé sur le devant de la scène grâce au remix de son morceaux One Day, cet Israélien de 30 ans fait office d’OVNI dans le paysage musical actuel. Doté d’une voix toujours maîtrisée au timbre si proche de celui d’une femme que cela en devient troublant, Avidan semble jouer de ce côté légèrement androgyne qu’il accentue par ses mimiques scéniques.

Fort de ses compositions à la fois poétiques et torturées, il nous emmène dans sa tête, dans son cœur et dans ses souvenirs. Si le voyage n’est pas inintéressant, loin de là, il ne semble pas conquérir les spectateurs présents. Passée la surprise de découvrir que non, la voix d’Asaf n’est pas le résultat de quelques manipulations numériques, l’attention redescend et l’on peut même sentir un certain ennui s’installer. A l’évidence, l’artiste avait raison en commençant par un « Je suis persuadé que la majorité d’entre vous n’a aucune foutue idée de qui je suis… ».

Probablement lassée par le côté un peu trop expérimental de sa musique, certains quitteront le Chapiteau à la moitié du set tandis que les autres se lanceront dans diverses discussions avec leurs voisins, créant ainsi un bruit de fond constant assez désagréable pour qui voudrait véritablement se concentrer sur la musique. Ce n’est qu’aux premières notes de One Day que la foule, réduite d’un bon quart, se réveillera soudain et scandera les paroles avec l’artiste. Celui-ci ne semblant pas prêter attention à l’attitude irrespectueuse de son public, assurera une prestation plus que correcte ponctuée d’anecdotes et de blagues parfois un peu douteuses.

En résumé cette soirée aura été pleine de très bonne musique, de prestations intéressantes et parfois surprenantes, mais également d’un regrettable manque de respect envers Asaf Avidan et ce malgré les efforts de l’artiste pour capter l’attention. Un point qui n’entache en rien la qualité de l’organisation, comme toujours avec les NJP.

Article : Dom Panetta
Photos : Matthieu Henkinet

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