L’Autre Canal de Nancy a privilégié les amateurs de hip-hop la semaine dernière. Le samedi 8 novembre, était réunie la crème des rappeurs lorrains dans le cadre de la demi-finale du Buzz Booster Lorraine. Grâce à Karma j’ai pu faire partie du jury.
Après la diffusion jeudi dernier du documentaire Un jour peut être, une autre histoire du rap français, de Romain Quinot et Antoine Jaunin, le rap allait encore une fois être à l’honneur. Si le long-métrage parlait d’artistes confirmés dans leur parcours à travers les années 2000, cette soirée avait pour but de mettre en lumière les nouveaux talents de demain. Dans le cadre du Buzz Booster Lorraine, organisé depuis des années par l’association messine Zikamine, les meilleurs rappeurs de la région allaient devoir se départager. Pour cette demi-finale 2014, huit groupes allaient se produire sur scène avec pour objectif, de se qualifier pour la finale du 6 décembre à la BAM de Metz Borny. Seuls quatre d’entre eux auront le privilège d’être sélectionnés.
Inutile de dire qu’au sein de cette sélection de huit formations, l’éclectisme était de mise. Au cours de la soirée et de la performance de chacun, faire son choix n’allait pas être si simple. C’est sans connaître les groupes que j’arrive à la salle de concert. Les quatre autres membres du jury connaissent mieux les groupes pour les avoir déjà suivis lors de l’édition précédente ou par simple intérêt. Il y avait Maud, rédactrice pour de nombreux médias hip-hop et habituée de ce type d’événements, l’inénarrable Rachid Wallas et les toujours aussi agréables Diane et Elise pour Zikamine. Pour juger chaque MC, une grille de neuf critères tels que le flow, l’entrée/sortie, la musicalité devait être remplie en attribuant des notes. L’accent était énormément mis sur le jeu, la présence sur scène et l’interaction avec le public. Pour un tremplin qui permet au vainqueur d’être pris en main pour ses projets et une tournée, ces domaines sont indispensables.
Cette soirée a permis de se rendre compte, pour ceux qui en doutaient, qu’il y avait bien de multiples façons de s’exprimer à travers le rap. Les artistes rassemblés ce samedi soir ont su apporter une diversité à la fois dans les sonorités, les textes et l’énergie. L’expérience de D-Track s’est confrontée à la spontanéité du Cartel, la conscience des paroles de Libre-K s’est mélangée à l’esprit de fête de Compton le French Californien, et le classicisme de Rus-Vi a jaugé l’expérimentation des intrépides Stratégie de Paix. Avec un set de quinze minutes chacun, avoir un show carré et préparé n’allait pas suffire face à la concurrence ; il fallait innover et se démarquer.
Certains l’avaient bien compris et n’avaient pas hésité à faire venir leurs fans et à interagir avec le public. Debza, dernier MC de la soirée, a pu profiter du soutien explosif de la foule, telle une tête d’affiche. Même si son charisme, sa technique et ses gimmicks étaient déjà indéniables. Son set a permis au jury de prouver la qualité des artistes réunis et la décision n’allait vraiment pas être simple. Entre les coups de cœur, les progressions évidentes et l’expérience, des arguments étaient nécessaires pour se mettre d’accord.
C’est dans le hall que D-Track, Debza, Stratégie de Paix et Compton le French Californien sont appelés et qualifiés pour la finale. La soirée se clôt dans une ambiance fair-play et la sensation d’avoir un véritable vivier d’artistes à surveiller de près. Les deux MC’s et le DJ de Libre-K ont eu la lourde tâche de commencer face à un public encore refroidi par la température extérieure. Avec les suivants, la 32ème Chambre, ils ont montré du potentiel, mais une technique et une présence sur scène à retravailler. Le Cartel a fait preuve d’une fraîcheur touchante comme Rus-Vi à qui il manquait sans doute un peu de folie.
Un tremplin qui a rempli toutes ses promesses et une belle soirée pour Zikamine qui peut se féliciter d’avoir permis à ces groupes de se mettre en avant. Le rap ce n’était pas mieux avant, la Lorraine est là pour le prouver.
Article : Nathan Roux