Live Report : Jean Elliot Senior – Centre FGO-Barbara – 29 janvier 2014

Ce mercredi 29 janvier 2014, toute la Lorraine avait rendez-vous au Centre Fleury Goutte d’Or – Barbara à Paris, pour venir soutenir Jean Elliot Senior. Il était invité par l’Autre Canal de Nancy pour un projet pour le moins inhabituel.

Scandale ! Voilà que même la musique devient délocalisée. Mais rassurons-nous, pour la bonne cause. En tant que SMAC bien élevée, l’Autre Canal s’attèle au développement des artistes et celui-ci passe notamment par la reconnaissance via la scène. A ce sujet, la salle nancéienne pensant avoir fait son possible sur la région avec Jean Elliot Senior, décide donc de venir le placer en tête de pont dans la capitale hexagonale. Quelques coups de téléphone plus tard, le voici programmé le temps d’une soirée dans le nord de Paris, au centre FGO-Barbara, elle aussi bien équipée en studios de répétition et d’une belle salle de spectacle de 300 places environ.

Jean Elliot Senior, programmé le 23 janvier dernier à l’Autre Canal dans le cadre des Inouïs du Printemps de Bourges, a également publié récemment son premier album : Balade Sauvage. Une bonne occasion donc de venir parler actualité dans le 18ème arrondissement, en compagnie de Sans Sebastien. Pour ce premier concert « Hors les Murs », une centaine de personnes avaient fait le déplacement pour découvrir l’énergie scénique de Jean Elliot Senior. Une prestation nette et efficace, des musiciens de haute volée dont un certain Eddy la Gooyatsh à la guitare et surtout le staff de l’Autre Canal au complet, son directeur Henri Didonna en tête. On notera également la bonne tenue sonore de l’ensemble et un jeu de lumières à souligner, notamment pour une salle de cette taille. Bref lancement réussi !

Autre point positif, une petite interview avec l’artiste réalisée sur le pouce, en compagnie de Marina, l’illustre chargée de communication des amis de La Roulette Rustre. On y découvre un Ro…Jean Elliot Senior plein de paradoxes, peu porté sur la chanson française dans ses influences mais souhaitant s’exercer à l’écriture en français plutôt que de s’adonner à la facilité de l’anglais. Autre légère contradiction, lui l’autodidacte, se retrouve entouré de musiciens de métier, lecteurs assidus de partitions et utilisant à tour de bras les « arpèges, quarte et coda ».

Avant, Mr Senior jouait dans un projet instrumental, baptisé Crève-Cœur. Il a eu l’occasion de tourner en Angleterre, Allemagne, Italie, majoritairement dans des squats, Jean étant durant un temps porté sur l’underground. Au bout de 10 ans, cela dit, nouvelle direction et album solo. En mars, une tournée acoustique est prévue, toujours en français, pour charmer nos voisins (et voisines, même s’il s’en défend). « l’émotion passe, quoi qu’il arrive, en France les trois quart des gens écoutent des choses qu’ils ne pigent pas ». Il ajoute même « le rap US, c’est imbitable ! Une chanson c’est un texte et de la musique ». On ne peut que lui donner raison, même si, pendant ce temps, une improbable reprise de « doyou, doyou, saint-tropez » est jouée par Sans Sebastien. Fou rire général, on s’en doute. Il en convient, le français est bien plus dur à faire sonner, mais c’est bien plus gratifiant. « et puis, je ne voulais pas faire de mes chansons une imposture, faire croire que je viens de Los Angeles. J’aime bien Gainsbourg, il sait vraiment faire sonner la langue française comme de l’anglais ».

On vient le voir, le compare à de la chanson française, mais fait étonnant, il n’en écoute pas. Au rang des meilleures questions, le visage de Jean Elliot s’illumine quand on lui demande « quel est la pire chose qu’on ait pu te dire sur ta musique ? » : « alors là bonne question, très bonne question ! Je reviens de tournée d’Angleterre, je fais une date à Nancy, dans le bar Le Coup du Monocle, rue Saint Jean. Je fais mon concert, un mec vient me voir, hyper sérieux. Il met la main sur l’épaule et me dit : « non mais, c’est pas sérieux ton truc là ? C’est une blague, c’est pas bien ». Alors, forcément, je lui dis « ah si, c’est sérieux ». Le mec se marre. « Ah deuxième degré, c’est bien ça, deuxième degré, on en a pas assez des artistes avec de l’humour ! ». Bon ok, je pense que le mec était un peu bourré, je le croise souvent en ville d’ailleurs. Mais lui ne sait pu qui je suis, il ne m’a jamais reconnu… »

Petit détour ensuite par le style vestimentaire de Jean Elliot Senior, Marina étant visiblement impressionnée par les belles chemises de l’artiste. « Un dur labeur » nous apprend-t-il et surtout un travail de longue haleine afin de chiner sur les meilleurs sites US ses plus belles trouvailles. Seul soucis : les tailles américaines. Tout un métier, le développement d’un artiste !

On blague, on blague et le moment est vraiment agréable, mais on est bien obligé de poser notre question fétiche. Plutôt Beatles ou Rolling Stones ? Réponse intéressante :
« C’est assez marrant, je me suis fait la réflexion hier. Je me suis rendu compte que les Beatles, j’écoutais pas, en fait. C’est-à-dire que j’ai l’impression qu’on connait tellement, qu’on écoute pas. Quand je dois mettre un disque, un des deux, je mets les Rolling Stones. Je met plus souvent les Rolling Stones en fait. Je saurais pas te dire si je préfère. C’est tellement dans mon ADN les Beatles ! Cela dit, quand je veux me faire plaisir, je me met un bon Gimme Shelter des Stones. Du coup, dans les faits, plutôt Stones. Je me suis fait la même réflexion avec les Pixies et Nirvana, que j’ai écouté en boucle mais que je n’écoute plus. Je n’en ressent plus le besoin. Naturellement, je mets pas. Je les ai tous, mais non. Quand je mets un vinyle, c’est les Stones ! Ils ont quand même ce côté trashos, qui est super. L’autobiographie de Keith est mortelle, le film Cocksucker Blues (réalisé par Robert Frank en 1970 ndlr) est mortel, sur leur tournée de reformation. Le mec se retrouve à filmer tout ce qu’il ne faut pas filmer. Evidemment, les Stones l’interdisent à l’époque. Aujourd’hui tu peux le trouver.»

En attendant la prochaine soirée délocalisée de l’Autre Canal, on laisse la parole à Jean Elliot Senior, décidément un artiste qu’on a pris plaisir à regarder et écouter :

« Moi, je sais pas ce que je fais, musicalement parlant, mais je compose les morceaux. Je crois que c’est ce qui marche bien ! »

Article & photos : Ugo Schimizzi

Bravo à toute l’équipe de L’Autre Canal et merci à Karine ;)

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