Interview : Tommy Emmanuel

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Si c’est Chet Atkins, son idole, qui le premier lui donna envie de s´essayer au « fingerstyle », cette technique de jeu qui permet de jouer seul les différentes parties musicales d´un morceau, (la basse, les harmonies, le thème, jusqu’aux percussions) Tommy Emmanuel, à 54 ans, en est aujourd’hui l’un de ses plus grands ambassadeurs. Suivant ses envies, sa guitare se transforme en harpe, en piano, ou en batterie, sous la seule impulsion de ses doigts. Cet alien de la guitare, qui mêle une incroyable dextérité, une précision hors du commun avec un groove irrésistible a déjà fasciné des centaines de milliers de fans à travers le monde. Une virtuosité qui n’a d’égale que son humilité et sa gentillesse.

En 1999, il reçoit des mains de Chet Atkins lui-même le titre de Certified Guitar Player, distinction que seulement quatre guitaristes au monde partagent. Constamment sur la route (300 concerts par an ces neuf dernières années !), Tommy monte chaque soir sur scène pour partager son amour de la musique, sa maîtrise de la guitare, et il vous le prouvera sur la scène du Conservatoire à Luxembourg le mardi 25 novembre 2014 à 20 heures. En attendant ce rendez-vous, il nous a parlé un peu de lui.

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Bonjour ! Peux-tu nous parler de ton premier souvenir lié à la musique ?
Bonjour Nathalie ! Je n’ai pas de souvenir exact. Ma mère m’a toujours dit que je criais beaucoup et que la musique m’apaisait un peu. Je pense d’ailleurs qu’elle écoutait beaucoup de musique lorsqu’elle était enceinte de moi. Elle m’a aussi dit que plus tard, dès que j’entendais de la musique, mon visage s’éclairait. C’est elle, d’ailleurs, qui m’a offert ma première guitare et qui m’a appris mes premiers accords. Je lui dois énormément.

Te souviens-tu de ta première guitare et où est-elle aujourd’hui ?
Je ne souviens pas de grand-chose, non. C’était une toute petite guitare électrique. Je ne sais pas où elle est aujourd’hui comme on l’a trimballée un peu partout. Je sais que la première guitare de ma mère est exposée dans le petit musée de notre famille en Australie qui est tenu par mon petit frère.

Vous êtes partis en tournée avec toute ta famille très tôt dans ta vie. Comment ton père a-t-il pris la décision de vous emmener en tournée ?
C’était dans les années 1960 et je faisais partie de l’orchestre ou du groupe familial, en fait. Un jour, après avoir participé à une émission de télévision en Australie, un producteur américain a dit à mon père qu’il fallait absolument que le monde nous connaisse et voit notre talent. Mon père ni connaissait strictement rien, mais il est devenu notre manager et il a appris sur le tas. On prenait donc la voiture et on vivait un peu comme au camping toute l’année. Pour moi c’était des vacances permanentes, car j’avais 5-6 ans.

Tu n’as donc jamais pris de cours de musique dans le sens classique du terme ?
Non, comme je disais, c’est ma mère qui a été ma première professeur de musique. Parfois, je regrette de ne pas pouvoir lire les partitions. J’apprends toujours à l’oreille et je rejoue ce que j’entends. Avec des connaissances en partitions, je serais capable de jouer sur des bandes originales de films par exemple, ce qui me plairait assez. En même temps, je suis déjà assez occupé comme ça par mes concerts, mais j’y ai déjà pensé.

Justement, après tous ces concerts, qu’est-ce qui te plait encore aujourd’hui concernant la scène ?
J’aime le côté improvisation en fait. Quand tu es sur scène, tu ne sais jamais ce qui va se passer. Tu ne sais pas comment sera le public. Des fois, tu attends que la magie s’opère et ça ne vient pas, alors que certains soirs, elle opère dès les premières notes de musique. C’est ça, ce qu’il me plait. Tous les soirs sont différents.

Qu’est-ce que tu voudrais apporter au public ?
Ce que j’aimerais, c’est leur donner un peu de bonheur le temps d’un concert. Je vois des personnes qui viennent me voir et qui sont originaires de pays très différents. Certains viennent me voir après une longue journée de boulot ou prennent congé et font de longues distances pour assister à un de mes concerts. Ce genre de choses me surprendra toujours ! C’est vraiment un très gros sacrifice. Donc, la moindre des choses que je puisse faire, c’est de leur faire oublier, du moins pendant quelques heures, le train-train quotidien, le stress et leurs ennuis personnels. Souvent, on me demande si le fait d’être un des « meilleurs guitaristes au monde » m’importe. Alors je réponds que non, ce qui m’importe c’est ça. Donner du plaisir aux gens. Je considère que je n’ai rien à prouver à personne aujourd’hui.

Je sais que tu as des problèmes d’audition. Penses-tu que cela a été un handicap dans ta vie ?
Non, pas vraiment. Je suis né avec ce souci, donc je m’y suis habitué. J’ai eu la fièvre jaune à ma naissance et c’est ce qui a provoqué ce problème. J’ai souvent considéré cela comme un handicap car je demande aux personnes autour de moi de répéter ce qu’ils viennent de dire. Comme tu vois là, je t’entends très bien. En fait, quand tu entends mal, ton cerveau a tendance à essayer de compenser certains sons ou certains mots entiers, ce qui fait que des fois j’entends des choses que les personnes n’ont finalement jamais dites (rires). C’est souvent très cocasse ! En tout cas, ce que j’apprécie, c’est écouter de la musique avec des écouteurs. Aussi, je suis persuadé que la nature a compensé ce sens par autre chose…Je pense que je ressens les choses peut-être différemment ou de façon plus sensible que les autres personnes.

Peux-tu nous raconter l’histoire de ta rencontre avec ton idole Chet Atkins ?
L’histoire commence très tôt dans ma vie. Je devais avoir 11 ans quand j’ai décidé de lui écrire une lettre de fan où je lui disais que je jouais de la guitare et que j’aimerais le rencontrer un jour. Il a pris le temps de me répondre quelques mois plus tard et j’ai même reçu une photo dédicacée. Il m’a écrit une lettre très encourageante. Je ne devais pas abandonner la guitare et dès que je serais aux États-Unis, il faudrait que je vienne le voir à Nashville. Nous sommes restés en contact par des lettres. Finalement, des années plus tard, je lui ai rendu visite à Nashville. Je l’attendais en bas des escaliers à la sortie de son bureau et il m’a reçu sans hésitation. On a joué ensemble ce jour-là et cela reste un de mes plus beaux souvenirs.

Cela s’est résumé à une seule rencontre ?
Non, on a même fait de la musique ensemble. En fait, c’était quelqu’un de très droit et de très humble. Il n’a tout de suite mis à l’aise et moi de mon côté, j’essayais de très bien jouer pour lui. Il m’a dit ce qu’il aimait et ce qu’il n’aimait pas dans ma façon de jouer. Il m’a beaucoup appris. En parlant d’apprendre, peux-tu me dire quelles langues vous parlez au Luxembourg ? J’aimerais savoir comment je dois vous saluer.

En fait, nous parlons trois langues officielles : l’allemand, le français et le luxembourgeois. Donc tu pourras parler au public au Luxembourg dans ces trois langues.
Waouh, merci, cela m’aide vraiment ! Il va falloir que je révise avant de venir (rires) !

Notre question rituelle pour terminer : Beatles ou Rolling Stones ? Et pourquoi ?
Je vais devoir choisir les Beatles. Ils sont tellement incroyables et chacun des membres est vraiment unique en son genre. J’aime aussi les Rolling Stones, mais les Beatles ont bercé mon enfance. J’ai rencontré George Harrison une fois dans ma vie mais je n’ai jamais rencontré Paul McCartney. Ce serait un vrai rêve de pouvoir un jour jouer ensemble.

Propos recueillis par : Nathalie Barbosa

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  • […] d’audition nous rappelle un peu l’interview faite avec un autre guitare héro : Tommy Emmanuel ici. Paul, loin d’être blasé, revient un peu sur sa carrière et surtout nous parle de cet album au […]

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