Interview : Drowning Pool

Ca fait quinze ans que Drowning Pool envoie du gros son sur la scène metal américaine. Malgré de nombreux déboires, le groupe garde sa hargne légendaire et revient en 2013 avec un nouvel album, Resilience. On pose quelques questions au co-fondateur et guitariste, C.J. Pierce !

Vous avez sorti votre nouvel album Resilience le 2 avril dernier. Vous avez un nouveau chanteur… Comment ça se passe avec Jasen Moreno ?

Mieux que jamais. C’est un super ajout à notre groupe, comme si c’était la pièce du puzzle qui nous manquait. Ca fait quinze ans que je connais Jasen. Je le connais parce que mon beau-frère jouait dans un groupe avec lui. En fait, il a tourné avec nous pendant un long moment, donc ce changement a été très facile pour nous. J’aime beaucoup son rendu vocal. Jasen apporte beaucoup de bons éléments, on est tous très contents qu’il nous ait rejoints, ça nous semble complètement naturel de jouer avec lui. Il a toujours fait partie de la famille, donc ce n’est même pas un changement à proprement parler pour nous, on est déjà tous sur la même longueur d’onde.

Quinze ans, c’est de longue date effectivement ! Vous ne l’avez pas casté, alors ?

En fait si ! Je ne savais pas du tout qu’il comptait participer aux auditions, mais il est venu. On a eu d’excellentes auditions, de très bons chanteurs se sont présentés, plus encore que les fois précédentes. Mais on connaît la chanson, on a déjà dû faire pas mal de castings de remplacement… Quand on doit remplacer un membre d’un groupe, on se doit d’essayer de ramener de la nouveauté. On avait déjà eu trois chanteurs. Bien sûr, pour nous, trouver quelqu’un qui convienne c’était aussi essayer d’atteindre un idéal. On voulait quelque chose d’assez différent pour se renouveler par rapport aux albums précédents, quelque chose qui serait vraiment motivant et excitant d’un point de vue musical, mais qui corresponde aussi à l’identité de Drowning Pool. Et je pense que cette fois ça fonctionne mieux que jamais, parce qu’on se connaît très bien, et que parallèlement à ça il apporte beaucoup de choses nouvelles. On a l’impression de retrouver le naturel des débuts, avec Jasen, avec notre nouvel album qui sonne plus metal. On en espérait même pas autant !

Un retour aux sources avec nouveauté intégrée ?

Oui, vraiment. Je pense que ça se sent, je connais Jasen depuis si longtemps que tout a été très fluide. J’ai le sentiment que cet album sonne comme un premier album. Il a ces notes super sauvages qui marchent bien avec notre musique. Il donne l’impression qu’il pourrait tout chanter, y compris les anciens morceaux qu’il nous a faits pendant le cast, ça donne un vrai mélange qui nous a convaincus. Au final ça nous semble être une progression très naturelle, ça s’est posé comme une évidence.

 

Comment s’est passé l’enregistrement de Resilience ?

Plutôt bien. Quand on enregistre ensemble c’est vraiment une histoire de groupe, et essaie de s’oublier un peu, de se dire « hey, ça ne tourne pas autour de moi, là ». Jasen écrit les chansons en plus de chanter, et il s’est très vite mis en place dans le groupe. C’est un type avec qui c’est très facile de bosser, en fait, ça n’a jamais été aussi simple qu’avec lui. On s’est lancés dans un certain état d’esprit, on s’est dit qu’on pouvait vraiment faire tout ce qu’on voulait avec ces bons éléments, qu’on avait la force de réaliser ce qu’on voulait musicalement. Si t’as pas cette force-là, ça ne vaut pas le coup, ça ne marchera pas. Je crois que c’est quelque chose d’important, même dans la vie, de faire preuve de volonté et de ne pas se mettre de barrières.

Pas de barrières pour Resilience alors ? Comment tu vois ce nouvel album ?

Pas du tout de barrières, non ! Je suis vraiment content de l’album, très content, c’est un album de nouveau départ. On avait tellement de choses qu’on voulait faire, et on a réussi je pense. On a plus de chansons que d’habitude, c’est un sacré morceau, musicalement autant que symboliquement. On a même pas cherché à obtenir ce résultat, à se dire « il faudrait qu’au final ça ressemble à ça ». J’ai l’impression qu’on a recommencé tout depuis le début, qu’on a construit autre chose et que ça s’est fait comme sur des roulettes. On est tous très heureux du résultat.

Ca envoie sec dès la première chanson… Anytime Anyplace parle d’en mettre plein les dents à des gens qui ne s’y attendaient pas. Est-ce que c’était une manière de dire « on est toujours là, et on a toujours la rage » ?

Anytime Anyplace, c’est un hymne de combat, oui, “name the time, name the place”, on est prêts. Tu sais, ç’a été une vraie bataille pour nous, pour avancer, continuer. C’a été la guerre pour en arriver là où on en est aujourd’hui. Et ç’a été un challenge de se maintenir malgré tous ces remplacements de chanteur. C’a été difficile, mais on est toujours là, still rocking ! Anytime Anyplace, c’est pour dire qu’on est prêts à se battre pour ce qu’on aime, ce en quoi on croit, c’est de ça que parle la chanson, oui. Pour ceux qui disent qu’on est un groupe maudit… Je vois ça comme une longue attente, en fait. C’a été une longue période de malchance, elle est terminée maintenant. Si on était vraiment maudits, je crois qu’on peut dire que là, on a payé notre dû, on a su affronter les pires épreuves et on voit l’avenir avec optimisme.

Vous avez enregistré la chanson hommage à Dave Williams, In memory of… sur Resilience. C’était un moyen pour le groupe de tourner définitivement la page ?

Oui, je crois que la date tombait parfaitement. C’était pour l’anniversaire des dix ans du décès de Dave. Ca faisait quelques années que je travaillais sur cette chanson. Je n’aime pas forcer le destin, surtout quand il s’agit de sujets sérieux, donc on a pris notre temps pour la terminer. Quelquefois je crois qu’il faut laisser le temps au temps, et laisser les chansons se développer naturellement sans pousser leur finalisation et leur sortie. Je l’avais pensée comme un hommage, c’était une première étape, mais il fallait attendre que tout soit cicatrisé pour que ça devienne une chanson plus large. On avait envie qu’elle puisse s’appliquer à la perte d’êtres chers, que ça parle à tout le monde. Du coup on a mis du temps à la sortir, mais je crois que le hasard a bien fait les choses. J’étais tellement heureux qu’elle soit sur l’album, et en même temps… Ca fait remonter beaucoup de choses. Mais je crois que c’est bien que ce soit fait. On a eu de bons retours sur cette chanson, les gens la comprennent vraiment. On a tous perdu un Dave Williams, un membre de notre famille, et on a envie de leur rendre hommage. C’était une part de notre vie.

Sur une note plus joyeuse …  La chanson Saturday Night parle de vivre de façon très « carpe diem ». Il y a une histoire derrière cette chanson ?

C’est vraiment la façon dont on vit ! On nous demande beaucoup  : « comment c’est, faire partie d’un groupe de rock ? ». Et honnêtement, quand les portes s’ouvrent un soir de concert, c’est toujours un samedi soir, et tous les lendemains c’est un dimanche matin avec une putain de gueule de bois. C’est vraiment notre mode de vie. Nos chansons sont agressives, c’est aussi pour ça qu’avec Saturday Night on voulait étouffer un peu le feu, lancer une ambiance plus festive, faire du rock pour s’éclater. Ca contrebalance avec la plupart de nos textes. On a pas envie de se prendre la tête quelquefois, je crois que ça s’entend sur quelques autres chansons de l’album, où on parle d’être ensemble, de s’éclater sans penser au lendemain. Si jamais on tombe dans l’ennui, on se donne des coups de pied au cul et on se bouge très vite. C’est aussi pour ça qu’on s’est lancés dans cette chanson, pour éviter la routine. En plus de ça je pense que ça parle aux fans, ce mode de vie, ça leur ressemble, c’est l’absence de prise de tête à laquelle ils aspirent. On essaie de prendre notre envol, de nous affranchir de beaucoup de choses. J’ai envie de me dire qu’on peut encore faire cinq albums, mais pas des albums où les fans se diraient « merde, cette chanson ressemble vraiment à telle chanson sur tel album ». Ca n’a pas d’intérêt de refaire sans cesse la même chose, je voudrais que ces cinq albums ressemblent au groupe, mais ne se ressemblent pas entre eux, que ça soit toujours nouveau et intéressant.

 

Vous aviez mis One finger and a fist en téléchargement gratuit sur votre site avant sa sortie. Qu’est ce que tu penses de la diffusion de la musique gratuite sur internet ?

Tu sais, si les artistes continuent à vendre des disques, c’est tout bêtement parce que ça coûte un bras de faire un véritable album. Il faut payer les producteurs, les enregistreurs, les équipes… Mais évidemment, j’ai envie que tout le monde profite de la musique, j’ai envie qu’elle soit diffusée partout pour tous ceux qui veulent l’écouter. Du coup je suis toujours tiraillé sur cette question. L’important pour nous c’est surtout les concerts, et parfois je me dis « merde, si les gens veulent écouter de la musique gratuitement, ils ne viendront pas aux concerts, c’est pas gratuit ». Du coup cette culture du gratuit, c’est super, mais j’ai toujours la crainte que les gens oublient ce que c’est un vrai concert, de la vraie musique live, qu’ils perdent ça. Après, s’ils veulent le télécharger illégalement, ok, c’est leur problème, et tant mieux parce que j’ai envie que le maximum de personnes entendent notre musique et l’apprécient. Mais qu’ils viennent aux concerts, c’est ça le plus important, c’est là où tout se passe.
D’ailleurs vous serez en concert à la Maroquinerie le 26 avril… Ca fait un moment qu’on ne vous a plus vus à Paris ! Un petit mot pour vos fans français ?

Oui, ça a pris un moment mais on est de retour en France, et je suis très content qu’on joue à Paris. Avec tous ces changements de labels, de management, ç’a été le bordel ! Du coup on est vraiment très heureux de revenir ici. J’adore Paris, j’y suis venu en vacances l’an dernier et c’est toujours aussi beau. J’ai grandi à la Nouvelle Orléans et il y a toute une culture française là-bas, donc ça me parle vraiment. Revenir avec toute la bande pour un concert, c’est encore mieux. On va essayer de refaire plus de dates en France et en Europe maintenant, ça nous manquait. Alors les fans français, venez au concert, venez traîner avec nous et boire un coup ! (rires)
Et une dernière, notre question rituelle : les Beatles ou les Stones ?

Oh pour moi, les Stones, c’est clair ! Ils continuent alors qu’ils ont quoi, soixante-dix ans ? Nous on fera pareil, je ne me vois pas arrêter juste parce que j’ai soixante-dix balais. Et ils continuent à assurer à leur âge. Je respecte les Beatles, en fan de rock, mais je ne sais pas, les Stones c’est un véritable exemple de persévérance. En plus de ça je les ai vus pour leur tournée… C’est quoi le nom déjà ? 50 and rockin’ ? Ils ont déjà cinquante ans de carrière, c’est dingue ! Leur show est complètement fou, ça ne s’arrête pas, ils continuent à en envoyer. C’est ça le rock n’roll, jusqu’au bout !

Propos recueillis par Marine Pellarin

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