Festival Passages : D’Ailleurs

D’ailleurs, c’est un peu plus que du théâtre, c’est une expérience en soi. Des étrangers venus en Lorraine, voilà qui nous rappelle l’histoire même de la région… Jean de Pange nous propose de découvrir l’histoire de six intervenants à travers des formes différentes. J’ai assisté au quatrième rendez-vous, Appelle-moi Ulysse.

Rassemblés au point de rencontre, les spectateurs s’amusent du mystère autour du spectacle. Personne ne sait exactement à quoi s’attendre, et la surprise est bien gardée. Embarqué dans un bus, le public part pour un court voyage, prétexte idéal pour une introduction : chacun reçoit un lecteur mp3 et est invité à écouter la présentation d’Ulysse, rythmée par des percussions dépaysantes. Les spéculations vont bon train… D’où vient Ulysse, « qui a fait un long voyage » ? Afrique ? Moyen-Orient ? La curiosité est attisée alors que nous arrivons dans une école primaire. Installés dans une salle de classe, Ulysse se présente à nous.
Ulysse, ou plutôt Zabiullah, n’a que 23 ans. Il est afghan. Bien qu’il n’ait appris le français qu’en arrivant à Paris, il y a deux ans, il s’exprime avec une certaine aisance. Alors qu’il entame seulement son récit et s’interrompt pour une chanson en tajik, un groupe de gamins curieux s’infiltre dans la salle, derrière lui et le surprennent. « D’où tu viens ? », « C’est quoi ton accent ? C’est bizarre ! », «  Comment tu es venu ? En avion ? ». Malgré la rudesse des questions des enfants et la théâtralité indéniable de la situation, on s’amuse de son retournement : en leur répondant, Zabiullah raconte son histoire comme une aventure épique, pleine de rebondissements.

Nous voilà embarqués dans un voyage de douze mois, à pieds, à travers l’Iran, la Turquie, la Grèce… Des anecdotes terribles sont racontées simplement, et le prétexte du jeune public donne plus d’impact encore au récit. Leur curiosité innocente et parfois déplacée permet d’aborder des questions parfois difficiles, ou au contraire très légères. On rit avec eux quand il nous raconte avec le sourire qu’il était si obstiné à l’idée d’obtenir ses papiers de réfugié politique qu’il a chanté En passant par la Lorraine à une secrétaire qui doutait de son dossier. Les enfants corrigent sa prononciation, et Zabiullah tient en haleine son public.
Au terme du spectacle, les élèves s’éparpillent et nous restons avec Ulysse, qui échange volontiers anecdotes et explications sur sa situation. Le public se fait parfois trop curieux et il refuse avec un sourire poli de donner certains détails trop personnels sur les raisons qui l’ont poussé à quitter son pays. D’ailleurs, bien que Zabiullah ait souhaité raconter son histoire à travers ce spectacle, il nous rappelle que c’est aussi du théâtre. Le hasard a voulu qu’il rêve d’être comédien bien avant que Jean de Pange ne lui propose de venir participer à ce projet. Une belle manière de terminer cet incroyable voyage.

Article : Marine Pellarin

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