Live report : La Géométrie Variable – Trinitaires (Metz) – 8 mars 2013
La soirée du 8 mars, aux Trinitaires marquait la naissance de La Géométrie Variable, le nouveau collectif / label qui a pour vocation de rassembler les acteurs messins de la scène hip hop / rap voire électro.
Ce soir, le programme est chargé, le caveau des Trinitaires doit accueillir tour à tour Do:No; Emois, Emois et Moi; Milfshake et Telemaque. Une fine équipe qui sillonne les scènes et bars de la région depuis un moment avec un succès grandissant.
Do:No
Le soin d’ouvrir la soirée est laissé à Do:No. Le public est accueilli par une projection vidéo en fond de scène et une intro envoyée par HTK. L’ambiance est posée et le caveau continue de se remplir quand Dono pose les premières paroles de la soirée. On sent d’emblée que le registre ne sera pas celui d’un concert de Patrick Sebastien. Dono n’est pas de ceux qui ont peur du vide et n’hésite pas à évoluer au bord du gouffre. Frôlant le slam par instants, le rappeur adopte un jeu de scène quasi théâtral et tisse rapidement les mailles de son univers pour y emmener les spectateurs. La projection en arrière plan y est pour beaucoup, montrant des images d’archive entre vie de tous les jours, guerre et nazisme. Cet ensemble donne rapidement l’impression d’écouter un militaire déclamant ses lettres du front.
La plume est bien aiguisée, la qualité des textes devance aisément ce que l’on entend trop souvent dans le rap français. Les thématiques sont apocalyptiques, on retrouve des références culturelles et religieuses.
Du côté d’HTK, le son est lourd, oppressant. Il sublime les mots prononcés, a moins que cela ne soit l’inverse, on se perd dans un ensemble bien pensé.
Comme cette soirée est placée sous le signe du « variable », Spitch vient ouvrir les hostilités le temps de quelques morceaux. Télémaque fait lui aussi une apparition le temps d’un couplet.
Emois Emois et Moi
La suite de la soirée est assurée par Emois Emois et Moi, autrement dit Spitch, lunettes de soleil vissées sur le nez, accompagné lui aussi par les beats d’HTK. La prestation s’inscrit dans un registre plus rythmé. Là ou DoNo nous avait plongé dans son univers mélancolique, Spitch, lui, se montre plus incisif dans ses textes tout en n’hésitant pas à arpenter la scène de long en large pour aller chercher le public. Derrière, HTK ose envoyer des beats plus relevés aux sonorités plus légères.
La plume de Spitch est elle aussi très bonne, ses mots portés dans une voix au timbre particulier prennent une dimension remarquable.
Entre les morceaux, le dialogue avec le public est présent, décontracté et contribue à l’ambiance « on joue à domicile » de la soirée.
Le set me semble passer à une vitesse folle, alors que le dernier morceau pointe déjà le bout de son nez. Pour l’occasion, Spitch, après avoir planté un pied de micro au milieu de la scène, se montre solennel et nous envoie un dernier « bonsoir ».
Télémaque
C’est Télémaque qui occupe le rôle de tête d’affiche de la soirée. Il a profité de l’occasion pour sortir une réédition de son album La haine ordinaire, renommé L’amour ordinaire, qu’il a enrichi de plusieurs titres et remixes. On relève la participation sur celui-ci de Spitch, MWTE, Artemus Gordon, Milfshake et Marie Madeleine.
Lorsqu’il entre sur scène, il fait monter avec lui une grosse dose d’énergie. On le sent porté par la motivation alors qu’il entonne les titres de son EP. Spitch, inépuisable, vient rapidement le rejoindre, pour assurer les backs.
Du côté des beats, c’est Cadillac qui a pris les commandes, toujours le sourire aux lèvres. Il n’hésite pas à faire le show derrière sa console tout en réarrangeant les morceaux. De l’autre côté de la scène, Capsule, pour sa part, s’occupe d’y ajouter des scratchs. Loin d’écouter la version album, on assiste à un set vivant et ce n’est pas pour me déplaire.
Après avoir ré-exploré l’EP, les camarades de la Géométrie Variable reviennent envahir la scène. On retrouve donc tout ce beau monde notamment pour les nouveaux titres Midas et Miaou Miaou, ainsi qu’une flopée de morceaux collaboratifs.
On passe de rap old school à des structures modernes, chacun en a pour son compte… Il n’y a pas à dire, la troupe sait y faire et le public en redemande jusqu’à la dernière minute. Cependant il faut encore laisser place à une formation…
Milfshake
C’est au tour de Milfshake de prendre possession du caveau. La dernière fois que j’ai pu les voir, c’était en after de Tha Trickaz sur la place de la République. Ils avaient alors récupéré un public chaud bouillant et dédié à la musique électronique et n’avaient eu qu’à entretenir les flammes, ce qu’ils avaient fait avec brio. Cette fois, Capsule et Cadillac sont seuls dans leur registre pour chauffer les oreilles du public avec leurs assortiments de scratchs et programmations folles.
A leur arrivée sous les projecteurs, la partie n’est pas gagnée tant le public s’est éparpillé après le set précédent. Mais, tel un chant des sirènes sous amphétamines, le son des deux compères finit par rassembler tout le monde devant la scène.
Entre compositions et remixes de titres connus, le set est riche en inspiration. Cadillac derrière sa MPC découpe, réarrange et déforme des samples bien choisis du bout des doigts tandis que Capsule n’hésite pas à le concurrencer avec des platines qui n’ont plus grand chose à prouver.
Un set haut en couleur et des plus festifs donc, pour clôturer la création d’une Géométrie Variable qui n’a pas fini de faire parler d’elle…
Article : Matthieu Henkinet
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