Live Report: Gavlyn + Jeff le Nerf + Pand’Or + 10vers aux Trinitaires (Metz) le 20 Février 2014

Mercredi 19 Février, nous voici déjà à la moitié de Freeeeze ! #3. Ce soir on donne dans le rap avec 10vers, Pand’or, Jeff le Nerf et Gavlyn aux Trinitaires.

Organiser un concert d’envergure le mercredi, c’est dangereux. Le public n’est pas forcément motivé à sortir en plein milieu de la semaine et les travailleurs et étudiants sont à cette heure plus préoccupés par leurs activités que par la musique. Pas nous.

La soirée débute donc avec 10vers. Le rappeur et sa clique arrivent tout droit de Toulouse. Très actif au sein de la scène locale de sa ville, 10vers vient ce soir avec la lourde tâche de chauffer la salle tout en démontrant son savoir faire.

Un regard côté salle justement, les rangs sont clairsemés et ne semblent pas prêts à se renforcer. Dur de garder son énergie sur scène quand le public semble absent. Pourtant le MC continue de donner le meilleur de lui-même.

Côté textes, on regrette le manque d’originalité. 10vers déclame un rap conscient, qui semble déjà entendu sur l’immigration, l’intégration, sa vie et ses proches et bien que la sincérité soit au rendez-vous, je regrette qu’il n’aie pas choisi d’angles nouveaux pour porter ses valeurs. Dommage, puisque la plume est là.

Heureusement, a fait sa place sur la setlist un freestyle réalisé pour « La poignée de punchlines », défi ou des mots sont imposés à un rapeur pour un texte original, ici se révèlent le maniement des mots et l’écriture dont est capable 10vers hors de ses thèmes habituels.

Le set touche à sa fin et alors que 10vers fait ses au revoir, c’est Pand’or qui fait irruption sur scène. Pas de changement de plateau donc, on passe sans attendre à la suite. L’effet de surprise est moindre et j’entends dans la fosse des « c’est qui ça ?! ». Ça commence bien.

La jeune part dans ce que j’espère être des égotrips avant de rapper pour justifier le fait qu’elle rappe… Le serpent se mord la queue, puisqu’elle en profite pour louper des paroles et laisser des blancs. Elle jette alors quelques lignes sur la misogynie du milieu musical dans lequel elle évolue, ce que je ne lui retirerai pas. Pourtant, les ratés s’enchaînent et effacent le message des esprits alors qu’elle conclue le morceau, passablement essoufflée par un « si un jour vous faites du rap, prenez un backeur ».  Ah…

Le live progressant, la qualité baisse et pour quelqu’un qui justifie sa place dans le rap dans ses textes, il faut reconnaître qu’elle se loupe beaucoup dans ce live. Ceux qui ont vu son passage dans Rap Contenders comprennent certainement de quoi je parle, puis qu’entre bafouillages et pertes de mémoire manifestes les deux prestations commencent à se ressembler. Quelques phases sont bonnes, mais difficile de les apprécier tant la prestation manque de réalisme.

J’ai conscience qu’il est facile de dire que mon jugement est exagéré, voici donc une phrase tirée du public derrière moi lors d’un passage instrumental: « là, c’est mieux… sans elle. »… Dur.

Place à présent à un poids lourd de la scène française avec Jeff le Nerf et sa clique. Aux premiers samples les basses prennent au corps, avant de laisser place aux textes aiguisés du protégé de Kool Shen. Sur la setlist, des sons récents mais aussi des classiques, « Jeff » n’oublie pas ce qui a fait son succès et le public l’en remercie. Du moins les spectateurs qui ont fait le déplacement, puisque la salle n’est toujours pas remplie et ne le sera jamais. Le mercredi a eu raison de l’affiche. Pourtant de l’autre côté, sur scène, il y a le feu. Ne relâchant rien depuis dix ans, le rappeur continue de manger la scène et le public assure volontiers les backs à l’image de Ben l’Oncle Rap (vu la veille au 7(7) ) qui hérite d’un micro tendu au premier rang.

Grosse claque de la soirée, le live suit tranquillement son cours et « Jeff » prend le temps de discuter avec le public entre deux gorgées d’eau bien méritée. « J’suis sur la fin. Ma haine je l’ai craché… Encore un an, deux ans et c’est fini. Y’aura pas de chichis ». La performance prend donc une autre dimension, et je me demande plus facilement s’il baffe verbalement par simple habitude ou par reste de convictions et même si on apprécie la confidence elle reste troublante.

Difficile pourtant de lui retirer cette hargne et ses textes crus, maintenus jusqu’à l’extinction des projecteurs.

 

Difficile d’attendre autre chose après une telle prestation. Pourtant il reste un nom sur l’affiche, celui de Gavlyn. La jeune californienne est accompagnée de son DJ, mais c’est seule qu’elle occupe le devant de la scène, l’arpentant tout en disséminant ses paroles à l’aide d’un flow efficace.

Pourtant, le public face à elle est relativement froid, une partie étant certainement venue voir Jeff le Nerf ou du rap français sans se soucier de la partie américaine de l’affiche, certains quittent même la salle. Pourtant une partie est très conquise, dans le mauvais sens du terme. Gavlyn n’est pas désagréable à regarder et cela n’a pas manqué de toucher la part stupide / alcoolisée du public qui passe rapidement des « I love you » aux « Fuck you ! » (et je vous épargne quelques insultes à la volée), la sifflant à chaque occasion. Gavlyn les ignore ou en rit, mais on sent la lassitude de celle qui préférerait être applaudie pour son rap que pour son décolleté… Dommage pour le respect de l’artiste et dommage pour l’image du public français.

Pour revenir à la musique, du côté des samples la qualité n’est pas au beau fixe. Certains sont énergiques et accompagnent bien le texte alors que d’autre minimalistes au possible se rapprochent plus d’un métronome que d’un véritable morceau, cassant toute l’énergie des textes. L’énergie, de Gavlyn, elle, ne faiblit pas et se maintient jusqu’à la fin du set et jusqu’en after dans un bar messin.

Ainsi se conclut la soirée la plus hip-hop de cette édition de Freeeeze !, les prochaines étapes qui nous attendent sont plus axées électro et nous vous les raconterons bientôt…

 

Texte: Matthieu Henkinet

Photos: Lauriane Fox

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