Le 4 février 2014, Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif et fervent défenseur du Made in France et des marinières, réunissait quelques trois cent personnes au Ministère des Finances, afin de fêter dignement l’anniversaire des Objets de la Nouvelle France Industrielle.
Alors, quid de cet obscure descriptif ? Abrégé ONFI, ces conférences mensuelles sur les Objets de la Nouvelle France Industrielle visent ni plus ni moins qu’à démontrer tout le potentiel créatif et surtout le pouvoir d’innovation existant en France. Loin de faire l’apologie d’un gouvernement ou d’un parti spécifique, la soirée se déroule simplement en quatre présentations visiblement limitées à quinze minutes. Durant celles-ci, avec plus ou moins d’aisance, des entrepreneurs ou des dirigeants déjà bien confirmés viennent présenter un objet, une innovation, un progrès notable, munis de présentations powerpoint pour une fois simples et élégantes.
Nous pourrions longuement parler de trois innovations. Elles n’appartiennent cependant pas au champ d’activité de Karma autant que la quatrième. Mais il serait injuste de ne pas les citer malgré tout, tant le savoir-faire démontré peut être impressionnant. Nous avons donc eu l’occasion de découvrir une source d’énergie nomade innovante co-créé par le CEA (commissariat à l’énergie atomique) et BIC (les briquets et stylos créés à raison de plusieurs millions d’exemplaires par jour), un pilulier communiquant (une révolution capable de sauver plusieurs milliers de malades et de faire économiser la bagatelle de 4 milliards d’euros par an) et une détection intelligente des ouvrages enterrés, grâce au système RFID.
Plus particulièrement, nous nous sommes intéressés à la création de Julien Hotrique, mathématicien et musicien, dont le but – simple et efficace – était de « créer l’instrument du XXIe siècle ». Si on peut s’interroger sur une certaine mégalomanie latente, force est de constater que le personnage a un discours bien rodé et présente surtout un objet – baptisé DUALO – aux atouts certains.
Semblable à un accordéon au design épuré, ce dernier revendique une utilisation intuitive, sans connaissance musicale préalable. Les plus réfractaires au solfège et à tout système de tablature pourront découvrir un instrument faisant la part belle au DIY (do it yourself). Les autodidactes apprécieront. Composé principalement autour du concept des accords, l’objet permet – à l’image d’un bon vieux synthétiseur – d’utiliser de multiples sons d’instruments biens connus (basse, batterie, violon, …) et de les enregistrer en les superposant.
Mieux encore, voulu par notre monde connecté, les pistes peuvent être facilement exportées, diffusées mais surtout réinterprétées et rejouées par d’autres utilisateurs. La piste agit ainsi comme un didacticiel, dont il suffit de recopier les couleurs s’affichant sur l’instrument pour en mémoriser le « code ». Astucieux et encore une fois dépourvu de notions spécifiques à la musique. On peut d’ailleurs rapprocher le fonctionnement d’une version augmentée et surtout traduite physiquement du logiciel GuitarPro, par exemple.
A défaut d’être un instrument révolutionnaire en soi, comme peut l’être un hang (instrument venu de Suisse) en proposant des sonorités nouvelles, le DUALO propose une véritable innovation du point de vue de l’usage et de l’apprentissage, ce qui, en soi, est déjà une avancée significative dans un monde « qui ne serait que plus beau avec un peu plus de musique », pour paraphraser Mr le Ministre.
Ce dernier, venu cette fois-ci sans croissants, comme pourront ironiser certains lorrains à la rancœur vivace, conclura tout sourire avec la remise de la médaille du redressement productif à chacun des orateurs, avant d’inviter son monde à une dégustation de crémant et cacahuètes, à défaut de pouvoir proposer champagne et petits fours. Restrictions budgétaires oblige…certains y trouveront certainement une source d’innovation à développer, qui sait ?
Article & Photos : Ugo Schimizzi