Dj Shadow & Cut Chemist – Fox Theater (Depuis Oakland, CA – USA)

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En ce 25 novembre, deux légendes du turntablism terminent leur tournée américaine Renegades of Rythm à Oakland, Californie. L’occasion pour Karma de vous livrer son avis en direct du pays de l’oncle Sam, sur cette rétrospective nostalgique des débuts du hip-hop, avant son arrivée en Europe en janvier 2015.

Voilà 7 ans que Dj Shadow et Cut Chemist ne s’étaient pas associés en live. Autant dire que l’occasion est immanquable lorsque l’on connaît le palmarès des deux loustiques. Shadow, précurseur du hip-hop instrumental est le premier à avoir réalisé un album entièrement composé de samples, devenu depuis une référence du genre. Cut Chemist, aficionados des rythmiques old school, scratcheur invétéré, producteur talentueux est connu en tant que Dj de Jurassic 5. Nous étions donc nombreux à avoir bravé la réputation de la ville de Oakland et ses 80 homicides annuels, sans parler des nombreuses voitures de polices et hélicoptères, venus ce soir encadrer une manifestation en lien avec les évènements de Ferguson, qui secouent actuellement le pays. Après avoir fait une prière pour notre voiture, nous entrons dans le Fox Theater, architecture des années 1920 et récemment refait à neuf de manière très classe.

DJ Shadow Cut Chemist renegades-of-Rhythm Flyer

Banlieue chaude, salle cossue et émeutes en cours à l’extérieur sur fond de tension raciale, en somme une soirée à l’ambiance solide pour le concept du Renegades of Rhythm Tour, qui est de présenter le Best Of de la collection de vinyles du pionnier du hip-hop et militant anti-apartheid : Afrikaa Bambaataa, aussi appelé The Amen Ra of Hip Hop Kulture. Le show se compose de 3 parties, entrecoupées de moments où Josh et Lucas prennent la parole pour expliquer comment Afrika les a autorisé à dénicher les meilleures galettes au sein de sa discothèque personnelle de 40 000 titres, dont il a depuis fait don à la prestigieuse Université Cornell. Le duo se pose donc en professeurs agrégés et adoubés, exhibant fièrement les vinyles originaux du maitre, pour certains encore annotés, dans une démarche quasi religieuse. Les différents chapitres nous font revivre la genèse du genre au travers, tout d’abord, des influences de Dieu Bambaataa, qui vont des Beatles à Kraftwerk en passant par James Brown ou encore The Police. Une fois cette introduction digérée, nos deux gourous enchaînent avec les productions personnelles de leur démiurge et de sa Zulu Nation, première organisation officielle de hip-hop créée en 1977 et qui aura compté parmi ses rangs Jazzy Jay, Cosmic Force, Jazzy Five et autant d’autres apôtres de la première heure. Les classiques sont aussi de la partie, on reconnaît le son chaleureux du jazzman Grover Washington ou encore Thin lizzy et Dexter Wansel.

Le mix est techniquement parfait et les DJs jonglent sur 6 platines avec une aisance et une complicité rarement égalée. Sans parler des deux samplers originaux ayant appartenus à Bambaataa et prêtés pour l’occasion. Musicalement, c’est comme si on avait retrouvé la recette de la soupe primitive. Funk, soul, disco, rock, reggae, électro et les toutes premières rythmiques du genre viennent se croiser dans un big bang sonore à la fois improbable et sublimant. Pour enfoncer le clou, une vidéo en toile de fond diffuse des images d’époque, probablement sorties de l’album photo du créateur, témoignant des premières réunions pacifistes de breakdance et de djing qui avaient lieu dans les garages de Brooklyn, premiers refuges contre la violence des gangs.

Le cours s’achève au bout de 2 heures, Shadow et Cut font un tour sur le devant de la scène pour saluer leurs disciples, puis disparaissent après un dernier remerciement emprunt de modestie et d’humilité à l’égard de Bambaataa, laissant derrière eux les vinyles impeccablement rangés pour une prochaine leçon.

Article : Rémi Flag
Photos : LAweekly – Derick Daily

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