Conférence de presse : Festival Solidays
Il reste moins d’un mois avant que ne se tienne cette nouvelle édition des Solidays. Il était donc grand temps de faire un peu plus connaissance avec le festival pour bon nombre de médias. De notre côté, nous avions encore en mémoire l’édition précédente (voir notre dossier), mais nous retournons avec plaisir apprendre les nouveautés que nous propose Solidarité Sida.
Rendez-vous était donc pris le 29 mai dernier dans un des bâtiments de la région Ile-de-France, en compagnie de Jean-Paul Huchon, président du conseil général d’Ile-de-France, de Luc Barruet, co-créateur de Solidarité Sida fidèle au poste, secondé par le président d’honneur de l’association, Antoine de Caunes, lui aussi toujours dans les parages depuis 1993 déjà. Marco Prince fini le tour de table, tandis qu’au premier rang dans la salle, on retrouve pèle-mêle MC Solaar, Christophe Mali du groupe Tryo, Wax Tailor, Mai Lan, les Naïve New Beaters, Sébastien Folin et une nouvelle fois François-Xavier Demaison (déjà rencontré à la Love Parade de septembre dernier).
L’ambiance est détendue, on échange les cartons sur la table officielle, la salle est plutôt remplie. Luc Barruet prend le premier la parole. « Quinze ans déjà, vous êtes toujours là, je ne sais pas si c’est triste ou joyeux. » On en a une petite idée, mais on le laisse poursuivre. Luc revient sur les débuts, de la chambre de bonne, du « rêve » de faire bouger les choses. Bien sûr, il est conscient que les gens viennent à Solidays pour la musique, « produit d’appel » servant à sensibiliser.
Il le voit comme un lieu de pèlerinage, nous aussi, tant les actions sont importantes et bien mises en avant durant les trois jours. Et puis, question « produit d’appel », on peut dire que le festival sait y faire. « Nous serons peut être complet avant l’ouverture, une première ! » souligne d’ailleurs le président, heureux. Une surprise est d’ailleurs prévue pour le 2 millionième (!) festivalier.
Jean-Paul Huchon, à la maison, salue la tenue de la conférence de presse « chez lui. » Un symbole pour celui qui a vu le premier vote du soutien de la région au festival, dans cette salle. Il est d’ailleurs fier de réaffirmer le soucis de partenariat et de fidélité cher au CG, notant que l’Ile de France demeure la région la plus touchée par le fléau qu’est le SIDA, malgré un recul sensible. Il vise l’augmentation des dépistages mais surtout des moyens d’informer, regrettant la méconnaissance du problème. En ces temps de mariage pour tous et d’égalité, Jean-Paul Huchon rappelle également son intervention à venir au Fond Afrique Solidarité en mettant en avant une charte de non-discrimination des personnes atteintes.
Les Naïve New Beaters, déjantés comme à leur habitude, tiennent à applaudir la création des Solidays, festival qui leur a permis de voir… un sein (oui, un !) pour la première fois en concert… Quand on dit que l’ambiance était détendue… !
Antoine de Caunes est lui enthousiaste en voyant « le monde présent. » Il rappelle le besoin de continuer à sensibiliser, tout en soutenant le côté divertissant et festif des Solidays. Le village associatif joue également un rôle important au milieu du dispositif se plait-il à préciser. « Il faut maintenant trouver d’autres moyens d’en parler. »
Est alors évoqué le sujet de la cérémonie des noms, moment important dans les 3 jours de fête à Longchamp, visant à rendre hommage aux personnes disparues afin de ne pas oublier tout simplement. Une des figures de proue de la démarche, Bruno Pascal Chevalier nous a d’ailleurs quitté en décembre dernier apprend-on. Il sera donc aussi question de rendre hommage à celui qui avait abondamment milité, allant jusqu’à une grève des soins pour supprimer la franchise médicale réclamée pour les plus démunis.
C’est d’ailleurs ces prochaines semaines que doivent être décidés par les gouvernements les engagements en terme de financement pour ces trois prochaines années. La France, première contributrice européenne et dans le pôle de tête mondial, est attendu au tournant. Il s’agit d’un vrai défi pour les différentes associations de lutte contre le SIDA que de faire perdurer la subvention, voir même de la passer de 360M€ (sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy) à 400M€ pour celui de François Hollande.
Suis une timide séance de questions-réponses qui s’étoffera au fil des minutes. On y apprend que Solidarité Sida a déjà été sollicité pour recréer les Solidays par exemple en Afrique du Sud mais que ceci n’est, en l’état, pas faisable techniquement ni humainement pour l’instant. Sont aussi évoqués les nombreux projets annuels de Solidarité Sida, à retrouver sur le site de l’association. Le rôle des parrains est aussi mieux défini, Sébastien Folin intervenant dans une belle tirade. Ok, donc, être parrain, c’est « mettre le pied dans la porte » et faire parler des actions de Solidarité Sida pour résumer ! La fatidique question du cachet des artistes est évoquée. Luc Barruet intervient sur ce point et précise que le coût zéro n’existe pas. Il rappelle tout naturellement que sur une tournée il y a l’artiste (ou le groupe) mais très souvent aussi des musiciens additionnels, des techniciens, ingés sons et light, roadies, chauffeurs qui doivent être payés pour faire vivre une famille. Doivent aussi être pris en compte les coûts de transport, des décors à faire voyager et que ces conditions changent d’un artiste à l’autre, qu’il soit français ou international, seul ou composé de 10 musiciens, qu’il voyage en vans ou en semi-remorque. « Le festival est deuxième en France en terme de fréquentation mais 10-12ème concernant son budget artistique. » Voilà qui remet les points sur les i.
Nous avons ensuite profité de la présence des artistes pour jouer aux questions-réponses.
Quelques questions à Christophe Mali de Tryo :
Comment en êtes-vous venus à jouer une première fois aux Solidays ?
On nous a proposé à la création du festival, Tryo, qui a 18 ans d’existence était alors un jeune groupe. On nous avait proposé dès la première année et c’est vrai que nous à l’époque on avait refusé, on avait peur du gros rassemblement, on préférait agir au niveau local, avec des petites associations. On ne voulait pas participer à Solidays mais plutôt à des initiatives régionales. Et puis très vite on nous a proposé de venir jour sur ce gros festival. On y a été pour pleins de raisons. D’abord parce que ça fait parti des valeurs qu’on défend, on se retrouve dans tout le travail de Solidarité Sida, que ce soit autour de Solidays ou ce qu’ils peuvent faire tout au long de l’année. Il y a aussi tout le côté artistique, on se retrouve dans un festival où on aborde un thème important, grave, mais ça se fait quand même dans la bonne humeur, c’est plein d’espoir, c’est un grand appel à la jeunesse et ça permet de mobiliser aussi bien le public que les médias, les politiques aussi. Parce que ça joue énormément de faire un grand rassemblement de la sorte, de faire appel aux artistes, ça permet de faire pression sur le politique pour en parler. C’est nécessaire parce que ça reste un défi des vingt prochaines années. J’espère moins.
Vous vous reconnaissez dans le rôle de parrain décrit par Marco Prince et plus spécifiquement Sébastien Folin, à savoir le parrain en tant que vecteur d’image auprès des médias ?
Nous, carrément, c’est un thème qui nous touche, c’est un thème sur lequel on a jamais écrit de chanson. Après, c’est sûr, soutenir au-delà de la musique, de juste faire un concert, vraiment soutenir à l’année par différentes actions et présences, avec Tryo, on répond présent à chaque fois, on est d’ailleurs là aujourd’hui !
Tu parlais de la peur de Tryo de faire des gros concerts, aujourd’hui on sent plutôt une vraie aisance…
Oui, c’est avec le temps. Nous au début quand on a participé au premier concert de lutte contre le sida, on n’avait pas l’habitude d’être payé, seulement défrayé. Quand on nous a proposé de venir jouer il y a quinze ans, on s’est dit « comment ça se fait qu’on nous propose autant d’argent pour venir jouer », enfin autant d’argent, ce n’était rien, mais pour nous… Mais c’est vrai qu’au début on y allait avec des pincettes, parce qu’on se sentait mieux dans des petits endroits. Après, avec le temps, Tryo a trouvé son public, décidé d’une ligne artistique, on a changé aussi, la société également, mais le thème est resté. L’envie est toujours là.
Les choses ont beaucoup changé, en général et pour Tryo, vous arrivez à garder du plaisir en jouant…
Sinon on ne ferait plus ça ! Tryo c’est une bande d’amis. Ce sont des amis qui nous ont mis là, déjà, qui ont créés le groupe. C’est une bande d’amis qui s’entendent hyper bien. On est sur les routes, on a envie de défendre des valeurs, de dire des choses, faire passer des messages. On est toujours là, même dans des salles plus grandes avec un petit côté artisanal, de faire les choses entre nous, simplement.
Egalité pour tous, mariage pour tous. Une prochaine chanson ?
C’est possible. Dans l’immédiat on va surtout laisser passer du temps maintenant que la loi a été votée. En effet, il y a des gens qui ne sont pas d’accord sur cette loi, c’est ainsi, maintenant on va passer à un autre combat ! Celui là il est gagné, vraiment, il y a une vraie égalité des sexes autour du mariage, ça permet d’amener aussi la différence sexuelle sur le devant de la scène, je trouve ça très bien. Il faut reposer les esprits à présent, la loi est passée et telle quelle, la droite ne l’abrogera pas. Elle fait partie de la société. Que des personnes ne soient pas d’accord, c’est leur droit, qu’ils l’expriment, pourquoi pas, mais maintenant il faut passer à autre chose.
Vous avez eu la chance d’être énormément médiatisé. Vous vous en servez pour défendre vos paroles et des causes comme Solidarité Sida ?
C’est sûr que d’un côté, on va être vraiment dans l’artistique, on reste un groupe et donc des « divertisseurs. » Mais le fait d’avoir du succès, un public, nous permet de recentrer notre débat sur certains thèmes. C’est vrai que nous, on essaye de pas trop s’éparpiller. On est énormément sollicité. Solidarité Sida fait partie des causes et assos qu’on défend toujours avec l’écologie. Peut-être que l’écologie et le SIDA seront les deux prochains défis de l’Homme, du point de vue mondial sur les prochaines années. L’écologie c’est sûr, on en est plus ou moins responsable. Et le SIDA, car cela touche toutes les catégories de personnes, c’est au delà de tout clivage, c’est mondial. C’est un défi à relever.
Ladilafé, votre chanson était aussi le nom du label de Patricia Bonnetaud. Cette grande dame partie trop tôt, qui a fait énormément pour la musique et qui vous a notamment découvert, comme bien d’autres artistes. Que vouliez-vous exprimer en écrivant cette chanson ?
Avec Ladilafé, on rentre dans l’intimité d’un groupe. D’un coup, on parle de la personne qui nous a découvert, sans qui on ne serait pas là aujourd’hui. C’est clairement un hommage à ce niveau là. Et puis, Patricia Bonnetaud était une femme de l’ombre, elle était atteinte d’un cancer, elle s’est battue pendant des années. A travers cette histoire très singulière, très intime de Tryo, on voulait aussi rendre hommage à toutes les personnes qui se battent pour la vie, ça rejoint aussi la cause du SIDA. Il faut aussi se battre contre la dépression, la maladie, la douleur. Ces personnes nous montrent de véritables leçons de vie. C’est une chanson pour tous ces gens-là, une chanson pleine de soleil…
Enfin, notre question rituelle : Plutôt Beatles ou Rolling Stones ?
Plutôt Beatles sans hésiter (rires) ! Et vraiment, je le dis au nom de tout le groupe !
Article et propos recueillis par : Ugo Schimizzi