Live Report : Sonic Visions – Rockhal – 23 novembre 2013

Voici la suite de mon week-end en immersion totale à la Rockhal pour l’édition 2013 des Sonic Visions. Nous sommes le samedi 23 Novembre, il est 11h et je pénètre une nouvelle fois dans les locaux pour assister à une journée de conférences. Le tout commence avec une première rencontre sur ce qu’on pourrait appeler « le business de la musique pour les nuls », autrement dit des explications et simplifications de la face cachée du métier, ce que les musiciens ne connaissent pas forcément bien mais qui les entoure…

Le tout est à nouveau animé par une fine équipe menée par Stuart Worthington (Music Manager Forum) et composée de  Justine Debicki (fondatrice de Boogie Drugstore), Julien Hohl (manager à Deaf Rock Records), Pieter-Jan Symons (Manager du label Rough Trade Distribution pour le Benelux), Billy Torney (manager du marketing à CNR Records), Didier Zerath (directeur de DZ Factory). Chacun des intervenants a un métier différent et représentatif de ce que comporte l’industrie musicale actuelle, la conférence en est donc enrichie et aborde tous les recoins en connaissance de cause. Du label au tour manager en passant par le promoteur, les rôles et limites sont expliquées jusqu’à poser la question du « jusqu’à quel point peut-on faire tout cela seul, au sein d’un groupe, et avec quels résultats ? ». Hier nous avons abordé le Do It Yourself et ses bienfaits, aujourd’hui nous en voyons les limites.

De nombreux sujets passent en revue, bien que l’on aborde ici un ABC de l’industrie. Sont abordés des thèmes complexes tels que les ventes de disques en opposant digital et physique, ou les mécanismes monétaires et leurs différents intermédiaires en suivant les modèles de diffusion.

 

En définitive la journée commence dans le concret et la masse d’informations à digérer est conséquente. Coup de bol, l’heure du repas arrive déjà… Seulement, la digestion attendra, puisqu’une heure plus tard, me revoilà dans la salle de conférence, cette fois pour y assister à une conversation haute en couleur animée par Allan McGowan (journaliste et consultant) autour du sujet « Qui nourrit l’artiste ? ». Une suite logique aux thèmes de la matinée puisque nous abordons cette fois les différentes sources de revenus sur lesquels les artistes peuvent compter.

Sont présents pour débattre du sujet Jake Beaumont-Nesbitt, Mathias Brinkmann (chef des ventes à Believe Digital), Eberhard Kromer (juriste, conseil) et Anthony Shaw (Directeur de Best Before Records).

Le fond du sujet est primordial, puisqu’il présente les moyens pour l’artiste de survivre et se produire sans devoir être caissier à mi-temps au supermarché à côté de sa salle de répétition.

Il apparait dans le débat que les artistes ont plus de clés qu’auparavant pour prendre en main leur propre business et ne peuvent plus se cacher derrière le manque de connaissances. Internet a remplacé les livres écrits par des juristes et propose toutes les réponses nécessaires.  Keith Harris est présent dans l’assistance et prend la parole pour donner des détails concernant un livre détaillant le cas anglais mais tout aussi riche en informations pour tous: «Easy Money ? The Definitive UK Guide to Funding Music »

Qui doit financer l’album ? La tournée ? Le Crowdfunding ? La famille et les amis ? Et quels sont les revenus réels ? Peut-on manger sereinement le dimanche avec nos parents quand ils ont financé notre album de black métal ?

La question des revenus numériques fait elle aussi sensation et plus précisément avec les 40% que s’accorde Itunes sans détailler ce qui en est fait.

Autant de ressources difficiles à assimiler pour les artistes présents, et qui n’ont pas fini d’en recevoir.

Le prochain rendez-vous est lui aussi en salle de conférence et aborde les tournées et leurs revenus. Sur la table : une bouteille de vin. Et autour de celle-ci, des conférenciers : Olaf Furniss (Journaliste et organisateur des Wide days), Michael Bisping (directeur du management chez ASS Concerts & Promotion), Tim Böning (chef exécutif chez Der Bomber der Herzen), Simon Eaton (MAMA&Compagny/promoteur The Great Escape), Nik Fischer (chef exécutif chez Breathing Hole Booking et directeur du One Of A Million Festival).

Au menu : l’importance du live, du contact avec le public, les premières parties. L’aspect financier et promotionnel. On s’attarde sur le merchandising, les exclusivités à proposer aux concerts mais aussi les produits originaux. S’organise alors un fil rouge ou le chef de conférence demande régulièrement à l’assistance quels produits les plus originaux ont-ils vu aux stands de merchandising. On nous parle de cafetières, de grinders, de chapeaux…

Une chose en tout cas parait claire pour tous : les artistes doivent se rendre disponibles à leurs stands. Contrairement à l’ambiance il y a 20 ans où tous pouvaient jouer les starlettes, aujourd’hui le contact avec public est primordial.

Les revenus en tournée peuvent constituer la plus grosse part de la bourse, mais pour autant il ne faut pas vendre n’importe quoi si on veut garder une image et une qualité fiable auprès des consommateurs.

Prochain rendez-vous dans le studio, je rentre alors que les discussions sont déjà en cours et pour la première fois en français. Le workshop est organisé par music:LX , le bureau chargé de l’exportation culturelle luxembourgeoise. La structure explique ses rôles, à savoir l’accompagnement financier des artistes en tournées à l’étranger. Bien que récent, ce bureau a déjà un succès considérable et est en relation avec de (trop) nombreux groupes luxembourgeois désireux de s’exporter.

L’export de la musique dans la grande région occupe une partie du débat. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les représentants de music:LX le qualifient de difficile et assurent vouloir resserrer les liens pour offrir aux jeunes groupes du petit pays qu’est le Luxembourg un rayonnement plus grand.

Une dernière pour la route ? Dernier passage de ce week end dans la salle dédiée aux conférences, cette fois pour y entendre Tim Renner (chef exécutif à Motor Entertainment) parler du lien avec les fans. Pour ce faire, sont conviés Caroline Bottomley (directrice du management à Radar Music Videos), Christian Hald Buhl (Partenaire manager à Factory 92), Henning Dietz (créatrice et directrice à Neu Management), Benji Rogers (créateur et chef exécutif de PledgeMusic).

Cette conférence « dessert » revient sur les points importants du rapport au fan en rappelant de nombreux points vus lors du week-end : le DIY, les réseaux sociaux, la promotion en tournée, le merchandising.

On se souviendra d’une phrase en particulier « les fans ne veulent pas plus, ils ont déjà tout : le contact, les objets, la musique, les vidéos. Ils veulent des raisons », à l’heure actuelle tout à chacun peut proposer des produits farfelus, des Meet & Greet, des séances de questions/réponses sur internet. Si on veut encore vendre, il faut trouver la relation de confiance avec le public qui fait qu’il choisira les yeux fermés votre produit parmi les autres. Et ce n’est pas une relation qui se simule, mais qui se tisse.

A présent, place à la détente et au spectacle. Retour au Sonic Visions Bar pour la remise des premiers « Video Clip Awards » dont voici les résultats :

-          Meilleure vidéo décerné par SACEM Luxembourg : « Get It » de Say Yes Dog dirigée par Stephen Korytko et Raoul Henri

-          Meilleur Jeune Réalisateur décerné par stART-up : Eric Schockmel (Studio M) pour « Shemale Obsession »

-          La récompense du Jury : « Radar » de Haschka dirigée par Jeff Desom

-          Le prix du public décerné par RTL, Eldoradio, Post : « Up » de Vintage Gigolos dirigée par Georges Waringo

Alors que le rendez-vous touche à sa fin et que l’open bar bat son plein il est temps de faire place au dernier showcase du week end, le groupe s’appelle Angel At My Table et il est Luxembourgeois.

Bien que la prestation soit en acoustique, le groupe dégage beaucoup d’énergie, les compositions sont propres. Le groupe vient d’enregistrer son album aux Etats-Unis avec Paul Leavitt et présente de nouveaux morceaux. Ainsi, on pardonne la chanteuse lorsque dans un sourire elle oublie quelques mots d’une chanson.

A mes yeux, la comparaison avec Paramore est facile  et cela ne tient pas que dans les cheveux colorés de Joelle, mais bien dans le son, la démarche et ce qui en dégage. Angel At My Table est l’un des groupes les plus prometteurs du Luxembourg et on sait pourquoi. A suivre de près.

C’est ainsi que se clôt le pan conférence / showcase des Sonic Visions 2013. Il est à nouveau temps de faire place au live pour une soirée avec en tête d’affiche les déjà mythiques Sigur Ros

Article et photos : Matthieu Henkinet

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