Ruth Gerson, chanteuse, compositrice et interprète américaine, est une artiste indépendante et ambitieuse qui parvient à être totalement autosuffisante : elle fait toutes ses réservations, organise ses concerts, engage ses propres musiciens et passe d’innombrables heures sur la diffusion de matériel publicitaire. Elle se produit en solo et avec un groupe, dans les clubs, les théâtres et les festivals partout aux États-Unis, en Israël et en Europe. A mi-chemin entre Sheryl Crow et Joni Mitchell, cette jeune artiste se balade entre le folk, la pop et le rock des fois. Elle était venue avec sa guitare et deux de ses filles au Centre Nic Braun à Hesperange fin juillet 2014 et on en a profité pour lui poser quelques questions.
Bonjour Ruth ! Comment te sens-tu après un concert comme celui-ci ?
Bonjour Nathalie ! En fait, je fais pas mal de concert comme celui que tu viens de voir. Nous étions dans une petite salle et j’avais l’occasion de pouvoir voir le visage des personnes du public. Ce n’est pas toujours le cas, comme quand je fais une prestation dans une discothèque, club ou bar. Comme la lumière est souvent tamisée, je ne peux pas voir tout le monde. Ici c’était un concert assez intime et j’avais l’impression de jouer pour mes amis. Je n’ai pas ressenti de pression. Je fais souvent des concerts chez les gens, c’est ce que j’appelle des « house-concerts » et c’est très agréable comme ambiance.
Qu’est-ce qui te plait dans le fait de voir les visages du public ? Cela ne te déconcerte pas ?
Non, au contraire. J’aime voir les expressions sur les visages. Souvent les personnes qui écoutent de la musique ne se rendent pas compte de leur expression faciale. Ils se laissent aller et souvent on voit tout de suite si la musique leur plait ou s’ils n’écoutent pas vraiment. Leurs pensées divaguent. Des fois quand je choisis un visage et que cette personne se rend compte brusquement que je la regarde, on se sourit. Un contact se crée.
Revenons un peu en arrière veux-tu ? Quels sont tes premiers souvenirs liés à la musique ?
Je n’ai pas de souvenir précis. Ma mère était une violoniste classique donc je me souviens vaguement l’avoir entendu répéter ses morceaux à la maison maintes et maintes fois. J’ai suivi un cursus classique probablement à cause d’elle. J’ai été à la Juilliard School à New York. La dernière fois, je dînais chez des amis quand un morceau que ma mère jouait souvent à la maison est passé à la radio. Je n’en connaissais ni le titre, ni l’auteur mais mon corps s’est mis à trembler et j’en ai eu les larmes aux yeux. Je n’en revenais pas de ne pas pouvoir contrôler mes émotions à ce point.
Sur quels projets travailles-tu en ce moment ?
Je bosse sur un scénario de film. Cela fait un moment que cela me trotte dans la tête et j’écris le scripte et la musique. Je ne sais pas encore si cela va être produit un jour mais on verra. Pour moi l’histoire est très importante. C’est l’histoire d’une fille et de sa grand-mère, sur fond de violence conjugale. Sinon j’essaie de sortir des singles très souvent. Je ferais sûrement un nouvel album à un moment donné, mais je trouve que beaucoup de chansons se perdent sur les albums. Les auditeurs n’écoutent que les titres qu’ils préfèrent et laissent de côté les autres. C’est dommage. C ‘est pour cela que je sors des singles : c’est pour attirer l’attention des gens sur certains titres en particulier. J’ai mis sur pied cette communauté de fans appelée « fans for life » où les personnes qui veulent avoir ma musique à vie, paient un moment fixe. Donc dès que j’ai un nouveau single, je leur envoie par e-mail.
Comment concilies-tu ton travail en tant qu’artiste et ta vie de famille ?
Je pense que comme pour la plupart des femmes : je fais de mon mieux (rires). Aujourd’hui, je donne des cours de chant à l’université, je fais des master classes. J’ai un peu ralenti concernant les tournées car là j’ai un bébé et donc je dois m’en occuper. Sur cette tournée-ci j’ai pris toute ma famille avec moi et c’est agréable de partir en tournée avec ses enfants.
D’ailleurs on a pu voir que tes deux filles savent très bien chanter, au vue de leur prestation ce soir….(ndlr: chacune des filles a chanté une chanson seule accompagnée par leur mère au piano). Que dirais-tu si elles venaient te voir en te disant qu’elles voudraient en faire leur métier ?
Je pense qu’elles ont toutes les deux du talent. Je leur enseigne les techniques vocales. Je pense que cette expérience, donc le fait d’être en tournée avec moi, leur montre les différentes facettes du métier. Elles ont constaté que tout n’était pas rose et que voyager cela fatiguait énormément. Elles savent maintenant que le fait de conduire, prendre l’avion et de ne pas savoir quand et ce que nous allions manger, c’est très stressant. Au moins comme ça, elles pourront choisir en connaissance de cause ! Je les encourage donc mais je ne les pousse pas à faire ce métier. Avec moi, elles se rendent compte qu’elles ne sont pas obligées d’être interprète.
Comme tu es coach vocal, quel est ton premier conseil que tu donnes à de jeunes artistes qui viennent te voir ?
Je leur dis d’ouvrir leur bouche (rires) ! Ça a l’air totalement idiot comme conseil, mais en fait, quand tu chantes tu prends des fois de très mauvaises habitudes. Tu as des muscles autour du larynx qui peuvent être entrainés mais le temps que cela arrive, il faut que tu crées de l’espace dans ta bouche. C’est la même technique que dans le chant lyrique. Il faut forcer l’ouverture de ta mâchoire en très très grand. Un peu comme quand tu bailles en fait. Le seul artiste que je connaisse qui est capable d’avoir une voix puissante sans ouvrir grand la bouche c’est Joe Cocker, mais il a des années d’expérience derrière lui.
Tu as aussi créé une ceinture spéciale pour le chant, non ?
Oui, j’ai créé cette ceinture que tout le monde peut acheter sur mon site. Elle te permet de garder le contrôle sur ta respiration et d’aider tes muscles intercostaux et du dos. C’est un genre de soutien, le temps de pouvoir avoir les muscles qu’il te faut pour chanter. En plus elle t’oblige à rester droite.
Enfin, notre question rituelle : Beatles ou Rolling Stones et surtout pourquoi ?
Ce sont deux groupes tellement différents ! J’aime les Rolling Stones pour leurs concerts et leur présence sur scène. Par contre, je n’ai jamais eu l’occasion de voir les Beatles sur scène. Je pense que je vais choisir les Rolling Stones car pour moi c’est une grande famille qui n’a jamais arrêtée de faire des concerts et de partir en tournée. Je les respecte pour cela car je sais à quel point c’est difficile.
Propos recueillis par : Nathalie Barbosa
