Interview : Mell

Photo par Emma Picq

Mell, Mélanie Frisoli de son vrai nom, est née en 1982 à Nancy et commence par se produire seule en l’an 2000. Très vite, elle est accompagnée par des musiciens et ensemble ils se produisent dans les bars lorrains. En 2002, elle est adoubée par le label nancéien AND music. Le premier album Mon pied en pleine face sort en 2003, suivi d’une première tournée française. Le second album arrive en 2005, il s’appelle Voiture à pédales. C’est pendant la tournée de cet album qu’elle se fait repérer par les Têtes Raides qui lui proposent de signer sur leur label, Mon Slip. Le 3ème album sort donc en 2007 (C’est quand qu’on rigole), réalisé par Christian Olivier himself (chanteur de Têtes Raides). Il aura un très bon accueil de la critique et du public, et Mell partira en tournée française, mais aussi internationale (Pologne, Allemagne, Canada).

En 2012, Mell a de nouveau des envies de changement et commence à composer avec des boîtes à rythmes. Ce sont les prémices de Relation Cheap. Solitaire dans l’âme, elle se lance le défi de faire un album seule. Cet album est sorti en avril 2013. Mell est actuellement en tournée, seule avec des machines et des machins, aux pieds et aux mains. Elle a d’ailleurs gagné trois prix (sur 5!) lors du Festival Casino 2000 – Saveurs Culturelles du Monde et fait grosse impression. Rebelle Mell ? Pas tellement ! Mais une femme avec beaucoup d’énergie et qui sait ce qu’elle veut. Rencontre avec une passionnée.

Raconte-nous ton premier souvenir lié à la musique !
J’ai 9 ou 10 ans, je mets à fond les Beatles sur la chaîne, le morceau c’est Dizzy missy lazy et là, avec une vieille corde trouvée dans le garage, je m’attache la guitare de luthier de mon père au cou. Je saute sur le lit en me regardant dans la glace avec une attitude super rock… Et la guitare se casse en deux… J’ai pris une bonne fessée.
C’est ça ou les Fabulettes d’Anne Sylvestre vers 6 ans.

Tu as gagné différents prix au Casino 2000 récemment. Quel prix t’a le plus fait plaisir ? Lequel t’a surprise? Que vas-tu faire des 500 euros ?
Les trois prix me font immensément plaisir car déjà je ne pensais pas gagner tout ça. En fait d’ailleurs je ne pensais rien… J’attendais les résultats impatiemment. Je suis très heureuse d’aller jouer en Belgique l’année prochaine, qui plus est, dans deux festivals prestigieux. Mon disque est distribué en Belgique, mais je n’y ai jamais vraiment joué !

Bien sûr, recevoir le grand prix du jury est un honneur, une reconnaissance et un bel encouragement à continuer mon bout de chemin. Les 500 euros ont déjà été dépensés puisque j’ai eu quelques problèmes techniques au début du concert et qu’il m’a fallu changer le matériel défectueux dès le lendemain du concert au Luxembourg. Donc c’est finalement très bien tombé !

J’aime bien ta guitare des années 50/60. Elle vient d’où ? Quelle est son histoire ?
Mes deux guitares sont des années 60. J’ai une Guild Starfire V de 1966, modèle pas très courant. Belle demi-caisse rouge-lie-de-vin que j’ai depuis presque 10 ans, achetée aux États-Unis. Elle m’a accompagnée quasiment tous le temps et je la joue beaucoup.
L’autre guitare est de la marque EKO, une marque italienne. Je l’accorde un peu bizarrement et je l’ai achetée à Pigalle il y a 4 ans, j’avais vraiment envie d’avoir le vrai son sixties et j’ai craqué sur son look. Tout le kitsch italien dans un même objet c’est fascinant ! Du nacre, un pourtour doré, le devant rouge à paillettes. Je l’adore et elle est super agréable à jouer. Elle répond immédiatement.

Tu as aussi différents tatouages. Quelles sont leurs significations ?
Alors ça c’est un peu plus intime. Je peux te dire qu’il y a deux hommages à des chanteurs morts, qu’il y a mon « cri de ralliement interne », quelques tatouages sentimentaux (mais jamais de prénom hein !), le dessin d’un copain chanteur sur ma jambe, des coups de tête comme ça à l’autre bout du monde quand je m’ennuie et que je n’ai pas fini d’en faire. C’est déjà pas mal, non ?

Tes sujets de chansons sont bien choisis. D’où t’es venu cette chanson des Minis miss ?
Tout simplement en lisant un article dans un journal qui parlait de ça. Enfin, plus précisément le journal parlait d’une expo où mère et fille étaient photographiées l’une à côté de l’autre. Assez flippant en fait. Et ces deux mots sonnaient bien… Mini miss.
Je me suis souvenue du film Little Miss Sunshine, que j’avais vu quelques années auparavant déjà et hop, l’idée était là, le riff de guitare, tout.

Pourquoi un one-girl-show ? Est-ce un vrai choix ?
Oui, j’ai toujours aimé jouer seule mais je me sentais toujours assez limitée en ce qui concerne la matière sonore. Une guitare acoustique, on a vite fait le tour. Alors j’ai décidé de travailler sur un set et une configuration qui me laisseraient une belle marge de manœuvre, une belle liberté sur scène. D’où tout ce bazar que je trimballe avec moi.
Je me permets pas mal d’improvisation. Je ne voulais pas que le matériel me bloque. Ça m’a pris un an pour trouver le bon matos et pour le connaître. Je voulais aussi un son de guitare particulier, donc j’ai pris le temps de bosser tout ça.

Tu vas aussi partir en tournée en Russie prochainement. Pourquoi ? Comment ?
Je pars grâce au réseau des alliances françaises à l’étranger. En Russie, ils sont très actifs et j’avais eu l’occasion d’y jouer déjà il y a deux ans. Je suis très friande d’expériences nouvelles et de concerts à l’étranger. Je trouve que le meilleur titre de transport c’est la musique de toute façon, ça permet de voyager et de ne pas être tout à fait touriste dans ces villes. Puisque qu’on y vient en proposant quelque chose. Ça permet une belle rencontre avec la culture locale et ça me dépayse.

Fais-tu de la musique à plein temps ?
Oui la musique est mon « métier » et je crois que j’y mets des guillemets parce que je prends énormément de plaisir à le faire.
Après, j’aime multiplier les expériences. J’ai été guitariste pour plusieurs chanteurs/chanteuses, j’ai composé pour d’autres ou pour des documentaires, des pièces de théâtre. J’écris aussi des petits livres de temps en temps. J’aime de plus en plus le travail en studio aussi et ça m’apprend la patience. J’en avais besoin !

Quel a été ton plus grand public ? En matière de nombre et en matière d’ambiance ?
Mon plus grand public je pense que c’était la grande scène des Francofolies de La Rochelle avec pas loin de 10 000 personnes. Je rejoue sur cette scène cet été et j’ai déjà peur !
En matière d’ambiance, j’hésite, il y a eu pleins d’excellents concerts, un peu magiques, un peu surexcités, où l’alchimie prend une dimension incroyable. Par exemple en Tunisie ou au Québec au Festival de Tadoussac.

Pourquoi cette reprise, Succès fou, de Christophe ? Est-ce que tu aimes l’ambiguïté de cette chanson chantée par toi ?
C’est une idée de la femme du réalisateur de mon dernier disque. Et c’était une excellente idée. Je n’y aurais pas pensé. Je me suis d’ailleurs demandé si j’allais assumer de chanter ça, puis en fait c’est passé tout seul. Et j’aime la jouer sur scène, je trouve que c’est une excellente chanson, un peu sixties dans l’harmonie et je l’ai un peu « pourrie » par rapport à l’original. Et oui j’aime l’ambiguïté et je trouve cette chanson plus intéressante chantée par une fille.

Quel est ton prochain projet de disque ?
J’ai le projet de faire un double album, avec deux disques aux ambiances très différentes, mais là je me suis lancée un défi. C’est très excitant et à la fois très flippant et puis ça demande beaucoup de travail, mais je suis prête. Tout n’est pas encore fini, je suis en train d’écrire, mais ça avance bien.

Qui a eu l’idée de ta pochette de disque pour Relation Cheap ? Est-ce un hommage à Bowie ?
Ça a été un processus assez bizarre cette pochette. Comme toujours depuis quelques années, je bosse avec une photographe, qui est devenue une amie, Emma Picq. On devait faire des photos en extérieur et en pied, il pleuvait, ce qui nous a découragées et on s’est retrouvé dans son appart. J’avais acheté des tissus dont ce tissu rayé et c’est la maquilleuse qui a eu l’idée du trait. Hommage à Bowie, pourquoi pas, mais je n’y ai pas pensé quand on l’a fait. Hommage à Kiss plutôt, non ? (rires)

 

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Est-ce que tu as envie de retourner aux États-Unis ?
Très ! J’attends l’occasion. J’aimerais y retourner et y faire de la musique évidemment. Si vous connaissez un groupe là-bas qui cherche une guitariste…

Notre question rituelle. Beatles ou Rolling Stones ? Et pourquoi ?
Très très Beatles. Et je ne sais pas l’expliquer, ça me touche et je trouve leur histoire plus belle, leurs divagations, leur logique, leur destin aussi, plus intéressant que celui des Rolling Stones.

 

Propos recueillis par : Nathalie Barbosa

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