Interview : Dragonforce – Sonisphere France 2013

Dragonforce existe sur la scène power metal depuis 1999. A l’origine venu de Londres, le combo compose aujourd’hui avec des musiciens venus de pays différents. Rencontre avec Herman Li, guitariste et Vadim Pruzhanov, en charge des claviers, aux avis…tranchés !

Alors, ce concert ?

Herman Li : C’était chouette. C’est notre premier festival cet été et je pense qu’on a pris un bon départ avec ce concert. On est plutôt contents !

Vous êtes en train de préparer un album, comment ça se passe ?

Herman Li : On a fini de l’écrire, on est en train de l’enregistrer dans des studios en Suède avec Jens Bogren. Ca se passe bien, mais c’est pas désagréable de se sortir un peu en concert.

Ça ne vous dérange pas de faire les deux en même temps ?

Herman Li : On l’a déjà fait dans le passé, en fait c’est quasiment toujours le cas : quand on enregistre, on ne se prive pas de faire des festivals. Ça nous aère un peu, ça nous vide la tête. Ça casse le rythme.

Vadim Pruzhanov : L’ambiance festival, c’est encore différent du fait de faire quelques concerts et de prendre du repos. Là c’est festival, studio, festival…

Vous préparez une tournée suite à la sortie du nouvel album. Vous pouvez nous en dire plus ?

Herman Li : Ça s’annonce être une bonne tournée, dans beaucoup de pays à travers le monde. On sera de retour en France aussi. Pour la sortie de l’album, ce sera début 2014.

Beaucoup de gens vos connaissent grâce à la présence du titre Through the fire and flames sur le jeu Guitar Hero 3. Vous ressentez l’avant et l’après, dans la masse des fans ?

Herman Li : C’est difficile à dire, pour être honnête ! Quand Guitar Hero 3 est sorti, on venait de terminer une tournée. C’était après la sortie de l’album, après tout ça. C’est vraiment différent selon les pays, il y en a où les gens ne jouent pas à Guitar Hero. Je ne sais pas si ça a amené des fans, même si certains ont aimé la chanson dans le jeu, le fait qu’ils écoutent l’album ensuite n’est pas évident, beaucoup restent bloqués sur cette chanson là uniquement. C’est un peu dommage d’ailleurs, on se dit que certains connaissent le groupe grâce à ça, mais ils ne vont pas venir aux concerts, ils vont juste rester chez eux et jouer au jeu.

Vadim Pruzhanov : Mais c’est vrai que Guitar Hero  a permis de faire découvrir beaucoup de groupes, c’est plutôt bien.

Herman Li : Pour ce qui est de Dragonforce, le nom est devenu célèbre partout en Amérique, tout le monde sait qui on est. Mais après, il faut connaître un peu la guitare, le metal… C’est encore autre chose que juste le jeu.

Vous êtes connus pour la technicité de votre musique, est-ce que vous vous placez des objectifs de rapidité, de technique quand vous écrivez vos chansons ?

Herman Li : C’est pas si important que ça, la technique, ça découle du reste. L’intérêt pour nous c’est de secouer la tête des gens qui vont écouter, c’est d’abord une histoire d’esprit, la technique n’est qu’une conséquence. L’important c’est simplement de jouer de la musique.

De quelle base vous partez quand vous écrivez ?

Vadim Pruzhanov : On part toujours de la mélodie, c’est vraiment l’essentiel d’une chanson. Le reste gravite autour, la mélodie est le pilier.

Qu’est ce que vous pouvez nous dire sur l’univers de Dragonforce ? Il y a tout ce folklore de dragons, l’ambiance fantasy… Vous en parlez peu, est-ce que c’est juste un extra pour vous ?

Herman Li : Pour être honnête… On en parle, mais beaucoup de gens ne lisent pas les paroles. On s’en fiche un peu, on est pas là pour leur dire quoi faire. On a des chansons qui parlent de fantasy, mais selon la façon dont on les lit, dont on les voit, elles peuvent très bien s’appliquer à des situations du monde réel.

Vous avez un son très spécial, beaucoup de gens le comparent à ce qu’on peut entendre dans des jeux vidéo, qu’est ce que vous en pensez ?

Herman Li : Et tu sais pourquoi ? C’est pas à cause du jeu, c’est parce qu’on a été les premiers à le faire. Il y a des groupes qui peuvent jouer des sons Nintendo à la gratte, et c’est la seule chose qu’on retient, parce que c’est la première chose qu’on remarque. Si tu joues quelques sons style Pac-Man dans un solo, les gens vont tout de suite penser « oh mon dieu, c’est un medley de jeux vidéo ». Mais ces sons-là, d’autres vont leur donner des noms bien en rapport avec le monde des guitaristes et pas en rapport avec le jeu vidéo. Ça dépend à qui tu parles. Peut-être aussi que ceux qui remarquent ça ont beaucoup joué aux jeux vidéo étant enfants, et ils sont conditionnés à reconnaître ces sons. On a pas vraiment envie d’être étiquetés « groupe qui fait de la musique de jeu vidéo », c’est tellement plus que ça.

Mais vous vous appropriez ce son, c’est aussi pour ça que votre musique est reconnaissable.

Herman Li : Oui, on a toujours eu une idée très précise du rendu final qu’on souhaitait. Utiliser des sons 8-bits c’est une chose, mais je pense qu’on met bien notre patte par-dessus.

Votre musique est aussi très rapide, c’est une chose à laquelle vous accordez de l’importance ?

Herman Li: On a jamais trouvé que c’était rapide, on a toujours joué comme ça. C’est juste que tous les autres jouent lentement !

Vadim Pruzhanov : On a quelques chansons qui sont mid-tempo, comme Seasons ou Cry Thunder, les gens n’ont pas l’air de retenir ça. On a une grande variation dans les rythmes sur les anciens albums.

Vous les jouez en live aussi ?

Herman Li : Oui, Cry Thunder et Seasons, on les a d’ailleurs jouées aujourd’hui, elles ne sont pas rapides. On a quelques ballades ici et là, on ne fait pas que de la vitesse. C’est toujours la même chose qui revient, les gens se disent « oh, ça sonne comme dans un jeu vidéo, ce mec est un shredder, il ne joue que pour la vitesse ». Mais c’est faux ! Regarde, Through fire and the flames, on va dire… On va dire qu’un million de personnes l’ont entendue. Peut-être qu’il n’y a que la moitié qui va penser que c’est rapide, l’autre arrive tout à fait à la jouer. On a 15 millions de vues sur cette vidéo, ils y en a là-dedans qui ne trouvent pas que c’est trop rapide !

Vadim Pruzhanov : Sur d’anciens albums comme Valley of the damned, on avait beaucoup de chansons très rapides, très intenses. Mais je pense que ce qu’on a fait dernièrement est plus accessible.

Vous parlez de shredding, vous aimez quand même ça ?

Herman Li : Ouais, bien sûr ! J’aime jouer doucement, j’aime jouer rapidement. Quand c’est un truc qu’on sait faire, on ne devrait pas laisser ça de côté.

Concernant vos fans français, est-ce que vous êtes satisfaits du succès que vous avez en Europe, et en France en particulier ?

Herman Li: On a pas ce rapport-là au public. Est-ce qu’on est heureux de notre succès ? Non. C’est surtout qu’on est heureux de pouvoir jouer la musique qui nous plaît. Si on devait jouer des choses qui nous déplaisent juste pour avoir du succès, ça nous poserait un sacré problème. Être connus, c’est pas vraiment quelque chose qu’on recherchait à la base. On fait ce qui nous plaît, si les gens aiment, ils aiment, tant mieux.

Vadim Pruzhanov : Cet été en festival c’était quand même super d’avoir de tels retours du public quand on jouait, ça ajoute au plaisir de jouer.

Vous avez tous des origines très diverses (Hong-Kong, Nouvelle Zélande, Ukraine, France). Est-ce que vous le ressentez, au niveau des influences, quand vous écrivez vos chansons ?

Herman Li : Je ne crois pas. On a tous des influences musicales différentes, bien sûr, mais on ne ressent pas les différences culturelles. Je ne crois pas que la culture de nos pays ait un impact sur notre musique. C’est surtout que chacun a son identité, et on tient à l’exprimer. C’est pour ça que par exemple, quand vous nous voyez sur scène, on ne tient pas à être habillés de la même façon. On ne se donne pas de règles là-dessus. On a tous des personnalités très différentes. C’est un peu comme un puzzle, tu vois ? Chacun son truc, un peu comme des superhéros avec chacun leur identité propre. On ne se dit pas entre nous « non, il ne faut pas que tu fasses ça ».

Vous parlez d’influences musicales différentes, vous pouvez m’en citer ?

Herman Li: Tout ce qui est progressif, Dream Theater, Symphony X, Joe Santriani. Des trucs plus metal aussi bien sûr. Plutôt du côté mélodique, ce qui m’intéresse c’est la guitare.

Vadim Pruzhanov : Pour moi un peu de tout, j’aime le prog, j’aime le mélodique… Black Sabbath, et j’écoute plein de pop music aussi ! Des vieux trucs, du dub step… J’aime bien varier, je pense qu’écouter toujours la même musique, ça bloque un peu. Je préfère me baser sur mon humeur pour savoir ce que je veux écouter, sans aprioris.

Et la finale : Beatles ou Rolling Stones ?

Herman Li : Aucun. Pourquoi faire un choix ? Ils ne font pas du tout la même chose. On a besoin de groupes différents qui font des choses différentes, et qui conviennent à toutes sortes de gens.

Vadim Pruzhanov : Ouais… Je suis plutôt d’accord.

Herman Li: On nous demande souvent avec qui on aimerait jouer, aussi, notre groupe de rêve, mais la vérité c’est qu’on s’en fout. Ce qui arrive arrive, c’est aussi pour ça que Dragonforce est Dragonforce, on se fiche de ce qui peut se passer autour. On joue ce qu’on veut, sans nous soucier du reste.

Propos recueillis par Guillaume Hann & Ugo Schimizzi
Transcription : Marine Pellarin

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